J’avoue avoir eu de l’appréhension en entamant ce récit de vie sur la prostitution, j’avais peur d’y trouver un énième texte sordide sur le sujet. Or c’est finalement tout le contraire, pas de misérabilisme ici. Le regard et le ton de l’autrice se veut humain et bienveillant, le livre est au final un beau plaidoyer pour le « plus vieux métier du monde » si souvent déconsidéré ou méprisé. Les clients eux n’en sortent pas toujours grandi, souvent pathétiques, parfois ridicules ou même dangereux occasionnellement, ils sont pourtant dépeints sans aucune condescendance, toujours avec l’idée de chercher à comprendre. Autre surprise, le livre est parfois très drôle, les situations cocasses et absurdes y abondent, et on se surprend à rire plus d’une fois. L’ensemble reste émouvant et chaleureux.
Pour finir je cite Emma Becker elle-même qui se fait la meilleure avocate de son œuvre :
« Un soir, j’avais saisi tout ce qui avait inspiré des ouvrages si tristes sur la prostitution. Et par fierté, parce qu’il est hors de question que je ponde un bouquin naïf ou misérabiliste ou pis, un bouquin qui n’aurait effleuré qu’une facette de ce travail, je me suis persuadée qu’il y aurait quelque chose de beau ou de drôle à écrire, même s’il faut racler le fond du fond. J’espérais que ma voix rendrait humaine la réalité de la prostitution… »