Léon Frapié frappe fort et très juste pour son époque.
Il s'agit du récit d'une jeune femme diplômée qui devient, par circonstances et nécessité, femme de service dans une maternelle de Ménilmontant, fréquentée par les enfants des familles les plus miséreuses de Paris.
L'auteur décrit la très dure réalité des jeunes écoliers sans imiter le côté pathos et protestataire de Zola.
Tout le monde en prend plein la gueule, les pères alcooliques qui frappent leurs gosses, les mères à grossesses multiples qui délaissent leurs enfants, les maîtresses et les fonctionnaires qui prônent des valeurs morales rétrécies, mais surtout le système éducatif formaté qui entrave le développement des gamins.
Mais le plus bouleversant résulte de ces petites victimes attachantes, sous alimentées et battues qui vivent leur condition avec une normalité désarmante. Un atavisme douloureux.
La fin du roman est également très réussie.
"Si l'on pouvait seulement prévoir approximativement, on ne résisterait pas à devenir fou d’épouvante : ça, ça qui vous regarde, cette misère deviendra grande et vivra ! ça, ça, ces douces lèvres qui éclosent, c'est la misère, le fond, la substance de la misère future ! Vous savez bien, les crimes, les suicides, les trafics odieux, toute l'abomination humaine, ça pousse comme autre chose, les voici !"