"La mystérieuse affaire de Styles" est le premier roman d'Agatha Christie et la première apparition de ses héros fétiches, à commencer par le détective belge Hercule Poirot.
Ce polar publié en 1920 vaut davantage pour cette raison que pour la qualité objective de son intrigue, tarabiscotée et confuse, qui constitue une sorte de prototype caricatural et brouillon de ce qu'on nommera le "roman d'énigme".
On constate que tous les ingrédients caractéristiques de l'œuvre christienne sont déjà présents : une riche demeure isolée au sein de la campagne anglaise, un meurtre par empoisonnement, une galerie de suspects ayant tous un mobile, la révélation finale lors d'une conférence de Poirot : le whodunit dans toute sa splendeur.
Dès son premier roman, Agatha Christie manifeste un réel talent pour caractériser des personnages intrigants, même si on regrettera la dimension caricaturale de ses héros, à commencer par le capitaine Hastings, plus naïf et sentimental que jamais, qui se révèle ainsi prêt à épouser la première venue, uniquement pour se montrer chevaleresque.
Autre aspect gênant du livre, la multitude d'indices et de fausses pistes finissent par donner mal à la tête ; la romancière anglaise apprendra par la suite à épurer ses intrigues.
Néanmoins, "La mystérieuse affaire de Styles" tient ses promesses et parvient à surprendre le lecteur dans son dénouement, selon un procédé narratif malicieux de l'auteur.
Toutefois, je considère que ce coup d'essai est à réserver aux véritables amateurs du roman d'énigme ; je conseillerais donc aux autres de se rabattre plutôt sur des romans policiers plus aboutis de la Reine du Crime, tels que "Dix petits nègres", "Le meurtre de Roger Ackroyd" ou encore "Le crime de l'Orient-Express".