Entre récit d'amour, aventure et (un peu de) science fiction

Barjavel écrit La Nuit des temps longtemps après une dystopie (Ravage en 1943) et un roman d'amour (Tarendol en 1946).
Au-delà du mixte Science fiction et récit d'amour et d'aventure, il y ajoute son décryptage historique et sociologique.

Roman de Science fiction car :
- la découverte en Antarctique rappelle clairement les Montagnes Hallucinées de Lovecraft (1931-1936) ;
- l'auteur met en scène des découvertes très récentes (bombe atomique, laser, ordinateur...).

Aventure car finalement après une 1ère partie centrée sur le contexte de la découverte, le romancier nous projette dans le passé pour nous présenter un monde à la limite de l'Heroic Fantasy. Dans cet univers lointain vont prendre place des événements violents et surtout la fuite épique de 2 héros.

Mais au global, ce sont précisément ces événements historiques qui reprennent des constantes de Barjavel :
- un antimilitarisme revendiqué, notamment dans le contexte stressant de la Guerre froide ;
- une méfiance envers le capitalisme,
- une vision d'une société multiculturelle parfois maladroite (les "noirs", les "gris", les "jaunes"...)
- l'instantané et la projection d'une société qui explose de l'intérieur.
L'auteur nous propose notamment une mise en scène de luttes étudiantes contre des forces traditionnalistes. Ce n'est pas sans rappeler le contexte de l'écriture (1966 et édition en 1968) : révoltes d'étudiants américains contre la guerre du Vietnam (1965) et d'étudiants français contre les institutions au milieu d'un monde en mutation (1968).

Un mot sur le style Barjavel
Il est simple, fluide et rythmé (les chapitres sont nombreux et très courts).
L'écrivain ne passera donc pas à la postérité pour son vocabulaire chatoyant et recherché.
Et donc de ce point de vue, il s'inscrit plus dans la lignée d'un Jules Verne. Ce qui n'est pas un mal en soit.

Au final, il ne s'agit donc nullement d'un roman de science fiction à la Asimov.
La dose de romantisme et de mélancolie y est bien supérieure.
Tout comme la vision sociétale de Barjavel est une composante majeure pour apprécier le roman.