C'est le deuxième roman de Balzac après les Chouans. Et ça se sent que c'est une oeuvre de jeunesse, malgré les remaniements ultérieurs.
Raphaël perd son dernier sou au jeu et veut se suicider. Attendant la nuit pour se jeter dans la Seine, il entre dans une boutique où un vieillard lui donne une peau de chagrin (cuir animal) qui exaucera ses désirs, mais se réduira peu à peu. SI elle disparaît complètement, il meurt. Le jeune homme accepte, n'ayant rien à perdre, et commande pour rire une orgie. En sortant du magasin, il rencontre ses camarades qui fêtent la Révolution de juillet en fondant un journal. Ils l'invitent à une soirée olé-olé, au cours de laquelle Raphaël raconte longuement son amour pour une coquette, Foedora. Ivre, Raphaël souhaite 200 000 livres de rente. Le lendemain, un notaire vient : il vient d'hériter. Raphaël croit désormais au pouvoir de la peau. Il vit en reclus dans un hôtel, son majordome lui sert d'écran pour lui éviter tout désir. Mais à un spectacle, il retrouve Pauline, la fille de son ancienne logeuse, qui est devenue riche. S'abandonnant à l'amour, il jette la peau dans un puits. Un majordome la retrouve : elle a rétréci dramatiquement. Après des tentatives pour étendre la peau qui laissent les savants pantois, le héros, agonisant, quitte son aimée et part pour une ville de cure au Bourget. Un duel l'en tire. Il se réfugie quelque temps dans une chaumière du Cantal, puis rentre et meurt dans les bras de Pauline. Celle-ci ne lui survit pas longtemps.
Ce roman est trop verbeux, parce que Balzac fait visiblement passer des éléments autobiographiques à travers le personnage de Raphaël, ce pauvre jeune homme qui mange son héritage en passant trois ans dans un placard parisien pour écrire un système. Bouillant, le narrateur omniscient en fait trop, distribue des leçons souvent fort misanthropes et veut en mettre "plein la vue". Disons que si les thèmes de Balzac sont là, le savoir-faire est encore tâtonnant : on ne trouve pas encore les fameux portraits balzaciens, dans lesquels la physionomie et le cadre de vie du personnage annonce sa destinée. C'est tout de même moins assommant que les Chouans.
La plongée dans le fantastique est intéressante, pourtant, puisque Balzac parle de "peau magique", mais ne tranche jamais : peut-être tout n'est-il que dans la tête de Raphaël. Il y a les prodiges physiques de la peau, qui brise un marteau-pilon et défie les tentatives du chimiste (moment amusant, où on sent que Balzac veut "faire moderne").
Les personnages sont tout de même plus transparents, moins ambigus que dans les romans ultérieurs : les paysans qui recueillent Raphaël à la fin, par exemple, sont juste de braves gens. On sent encore l'influence de Rousseau : la nature est bonne, c'est la société qui pervertit l'homme. Avec ce corrupteur involontaire de Rastignac, que l'on a du mal à détester.
Balzac aurait gagné à ramasser son propos : au lieu d'un roman, il aurait pu faire une nouvelle intense comme le très beau "Adieu".