Entre réve et réalité
Sorti bien avant le film, ce livre est finalement une critique de la mode des routard. Ces "aventuriers" occidentaux déferlant notamment en Asie, qui sous couvert de rechercher des sensations fortes...
le 9 oct. 2010
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Ce qui s'annonçait initialement comme un simple "thriller sous les tropiques" (pour reprendre une expression que j'aime bien d'un autre influenceur) se révèle être, après lecture, un roman dense et complexe qui illustre parfaitement la quête effrénée (et souvent illusoire) de femmes et d'hommes qui, en recherche de nouvelles expériences à vivre en marge de la société, sont rattrapés par les lois naturelles ou humaines et commettent irrémédiablement les mêmes impairs les menant droit vers le modèle initialement décrié / rejeté.
Plus riche et moins manichéen que le film éponyme réalisé par Danny Boyle, La Plage trouve sa force dans l'installation progressive d'un climat paranoïaque et dérangeant (symbolisé par les errances mentales de son héros) dans un environnement a priori parfait et idyllique - un cadre de vacances comme rarement imaginé.
La fracture du groupe sera pourtant inévitable, conséquence d'une accumulation d'éléments contraires ( intoxication alimentaire, attaque de requins, impasse d'une cohabitation pacifique avec des trafiquants de drogue
) contribuant à l'implosion d'une communauté fragile, idéale tant qu'elle restait préservée, jusqu’à un certain point, des contraintes extérieures ou refusait simplement de les voir (seuls Sal et Jed puis Richard maintiennent cet éveil permanent avec le monde au-dehors pour mieux en mesurer les menaces et les opportunités).
J'ai trouvé le comportement de la communauté remarquable d'hypocrisie, jamais volontaire pour réaliser des "expéditions riz", pourtant nécessaires à sa survie physique voire mentale (fourniture de piles) et ô combien nécessaires.
Par ailleurs, j'ai apprécié le fait que le roman ne cède pas aux mêmes facilités que le film en développant des "amourettes" secondaires (par exemple l'attirance de Richard pour Françoise n'est jamais concrétisée), symbolisant une sorte d'"impasse émotionnelle / relationnelle" frappant la plupart des membres de la communauté.
Même si je recommanderai particulièrement ce livre aux voyageurs et "routards", qui décèleront dans les aspirations des personnages un écho aux leurs, passer à côté de ce livre serait pour autant dommage. N'hésitez pas donc si vous appréciez les romans prenants, dépaysants et fins observateurs des comportements humains.
A l'issue du roman, une question se pose au lecteur, potentiellement tiraillé entre deux choix extrêmes : vaut-il mieux vivre des expériences uniques dans un modèle coupé du monde ou mieux vaut-il s’insérer dans le cadre rassurant et « ronronnant » d'une société civilisée qui pourra répondre à ses principaux besoins (manger, dormir, gagner sa vie, voyager) ? En se montrant aussi pessimiste et noir dans son propos, l'auteur /voyageur semble lui s'être déjà forgé sa conviction. Une réponse sage consisterait à dire que, comme souvent, la réponse réside dans un juste milieu.
PS : j'ai intitulé cette critique "Bittersweet Symphony" en référence à la chanson des 90's qui selon moi collait bien à l'esprit du roman et aurait trouvé sa place dans le film - chanson écoutée au départ et à l'atterrissage d'un avion pris pour un séjour à l'étranger durant lequel j'ai lu et même dévoré La Plage.
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Créée
le 21 mars 2022
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