"La pointe d'argent" est un tome à part de la saga des Annales de la compagnie noire, puisqu'il ne suit ni le destin de la Dame, ni celui de Toubib.
Un groupe de quatre hommes malhonnêtes et avides tente de s'emparer de la pointe d'argent plantée dans une écorce du fils de l'arbre-Dieu. Les hommes étant ce qu'ils sont, chacun tentera de s'en emparer, que ce soit pour le pouvoir ou pour la richesse. Ou même pour le simple fait de semer la destruction, comme c'est le cas du boiteux. Oui, il a de nouveau survécu et est décidément immortel. Il est désormais accompagné de l'abominable Saigne-Crapaud-Le-Chien.
Ici, le narrateur principal est Casier, le nouveau meilleur pote de Corbeau, qui rédige un journal où l'on peut constater la déchéance de son ami après son échec à reconquérir le coeur de Chérie dans le troisième tome, ainsi que leur objectif qu'est la récupération de la pointe d'argent, contenant tout le savoir et toute la puissance du Dominateur. Saigne-Crapaud-Le-Chien et Smed (l'un des quatre voleurs...) ont un également un rôle de premier plan que ce soit dans la narration ou dans l'histoire en elle-même. Il ne faut pas s'attendre à un retour de Corbeau ou de la rose blanche dans la vie de Toubib. Au début du quatrième tome, il a la larme aux yeux en voyant ses amis quitter définitivement sa vie. Et il avait raison inutile d'espérer comme je le faisais pendant que je lisais les 4 et 5èmes tomes.
Je tiens à dire que ce bouquin est plus que légitime; Le tome 3 nous prouve bien que Glen Cook avait préparé le terrain. La tête du Boiteux qui n'avait pas été anéantie, Saigne-Crapaud-Le-Chien qui revenait sans cesse à la charge de l'arbre, la mort de Bomanz qui était plus que suspecte....
Aussi, je ne ferai aucun reproche à l'auteur d'avoir écrit ce bouquin, contrairement à Maurice Druon pour "Quand un roi perd le France", bien au contraire, il était pour moi nécessaire de nous faire connaître le destin de la Rose Blanche, de Silence et de Corbeau.
En soi, le bouquin a très bien été traité. En plus de nous montrer de manière satisfaisante l'évolution de l'empire en l'absence de la Dame, la trame créé des moments vraiment très forts. C'est en grande partie dûe à la menace croissante autour de nos quatre voleurs, et à l'atmosphère en semi huis-clos. Décidément, Smed est un bien meilleur narrateur que Casier qui n'est pourtant pas ennuyeux, dont le rôle véritable est de nous faire connaître le "devenu" des relations des personnages entre eux.
Alors pourquoi n'ai-je pas mis une aussi bonne note que pour les tomes précédents ?
Pour deux raisons.
Premièrement, Je n'aime pas la façon dont Corbeau a été traité. Quand on connaît le personnage, cela ne semble pas illogique. Mais il a désormais bien trop tendance à prendre systématiquement les mauvaises décisions, il n'est plus que l'épave de ce qu'il était. L'auteur tente de nous embrouiller l'esprit, de nous faire nous poser des questions à son sujet sans grand succès. Il n'a au final fait qu'abîmer un personnage absolument mythique. Le Corbeau de "La pointe d'argent", bien qu'approfondi, me semble trop faible mentalement, pour l'image que je me faisais de lui, trop... Con. On s'aperçoit au fil des pages qu'il n'est rien de plus qu'un sociopathe. J'aurais préféré voir un Corbeau qui remonte réellement la pente, comme il l'a toujours fait. Cela reste toutefois ma perception des choses, et je suis sûr que beaucoup d'autres fans de la saga, qu'ils aient autant apprécié Corbeau que moi ou non, n'ont pas le même avis.
Deuxièmement, la fin... Elle me paraît bien trop bâclée, et particulièrement la mort d'un des personnages principaux de la saga que je ne citerai pas enfin de ne pas vous spoiler, mais qui aurait mérité mille fois mieux qu'un retournement de situation aussi facile, aussi soudain... ça n'aurait pas coûté grand chose à l'auteur d'écrire dix pages supplémentaires.
Bien sûr, ces défauts là sont grands, mais tout de même minoritaires. Ils n'enlèvent en rien les grandes qualités du livre, et la simple présence de Smed en tant que narrateur suffirait à en justifier l'écriture selon moi.
Autre détail important; La pointe d'argent se passe en même temps que le quatrième tome. On peut aussi bien le lire en tant que quatrième, cinquième ou sixième tome.