Michel Foucault, Björn Borg, Valéry Giscard d'Estaing ont en commun de figurer dans La septième fonction du langage. Mais ce ne sont pas les seules vedettes de ce roman aussi rocambolesque qu'hilarant qui prend pour point de départ la mort "accidentelle" de Roland Barthes au sortir d'un déjeuner avec le candidat à la présidence de la République, François Mitterrand. Et si c'était un meurtre ? A partir de là, la machine romanesque de Laurent Binet se met en marche et tout s'emballe. L'auteur passe au tamis burlesque toute la fine fleur des intellectuels de l'époque, de Derrida à BHL en passant par Sollers, Kristeva et Althusser, sans oublier d'inviter Umberto Eco à la fête ainsi que les figures politiques de l'époque. C'est un bouquin d'aventures abracadabrantes dont la matière première est le langage dont Binet explique les théories absconses façon La sémiologie pour les nuls, avec une virtuosité imparable. Le thriller a beau être délirant, il possède sa logique interne avec des scènes d'action à couper le souffle, des échanges intellectuels de haute volée et des connotations triviales qui laissent pantois. Tout cela sans transition dans un exercice périlleux mais jubilatoire de grand foutoir narratif où des tueurs bulgares à parapluie et des membres des Brigades rouges viennent semer la pagaille. Sans compter qu'entre une discussion au QG des socialistes, une explication pointue de la pensée de Roman Jakobson et un match entre Lendl et Borg, l'enquête menée par un flic très rustre et un maître de conférences maître ès logorrhée finit tout de même par nous donner le fin mot de la signification de La septième fonction du langage. Bref, un roman dingue et roboratif totalement à l'opposé des autofictions que nous sert la littérature française plus souvent qu'à son tour. Et derrière ce quasi pastiche du Nom de la rose le lecteur de se demander : mais que représente aujourd'hui la pensée française en comparaison de celle des années 80 ? La réponse à la question n'est pas dans le livre mais l'unique chemise noire de BHL, si ! (Comprenne qui lira).

Cinephile-doux
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le 4 janv. 2017

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