Après des années sans lire de Shakespeare (9 au total), j’ai retrouvé la beauté de ses lignes avec une surprenante crise d’envoûtement dans La tempête. Toujours peu spécialiste de cet auteur, J’avais un peu peur car il faut bien dire que si j’ai adoré découvrir plusieurs récits de Shakespeare, mes dernières lectures m’avaient bien peu amusé. En effet, Un Songe d’une nuit d’été m’avait plu mais a laissé peu de marques dans mon esprit tandis que La Nuit des Rois fut une lecture que j’ai bien peu aimé.


Pourtant ici le charme opère bien vite tant Shakespeare parvient à mêler des éléments tragiques à une pièce qui est pourtant de l’ordre de la comédie tant on sait par avance que rien n’est réellement dangereux pour les personnages.

On suit un équipe qui subit une tempête. Une tempête terrible. Ils vont tous mourir ou du moins le pensent-ils.


Il s’agit en réalité d’une tempête magique lancée par le sage Prospero, ancien duc de Milan, qui attaque ici le navire qui porte ses ennemis qui l’ont trahi et condamné à l’exil. Il va tirer sa vengeance d’une union féconde entre sa fille, Miranda, et le fils du Roi de Naples, Ferdinand. Son but est de pardonner ses ennemis mais de retrouver aussi sa place. Il veut faire ouvrir les yeux à tous et quitter son île une fois pour toute, laissant au passage Caliban, son serviteur difforme et mauvais, fils de sorcière, mais aussi Ariel, esprit des airs, créature magique qui lui doit obéissance.


C’est bien ce mélange de tragédie et de comédie, de réalisme et de magie, qui offre un spectacle charmant.

En effet, Ariel est envoûtant comme esprit malicieux, fidèle et pourtant quémandeur de sa liberté. J’ai clairement adoré le personnage. Simultanément, Caliban est à la fois un monstre physique et moral (n’oublions pas qu’il a voulu violer Miranda), qui offre une réflexion possible sur les peuples jugés comme primitif. Shakespeare parvient à donner une forme d’humanité dans un personnage qui apparaît pourtant à première vue comme purement négatif.

Ces nuances sont vraiment agréables.


Les mêmes nuances parcourt l’oeuvre qui très vite nous fait comprendre que rien de grave n’arrivera, que l’on reste dans le domaine de la comédie, même si plusieurs personnages cherchent à tuer d’autres personnages, parfois coupables eux-mêmes d’autres crimes. C’est cet ensemble de nuance, cet enchaînement de danger et d’absence de danger, le tout avec un Prospero qui a un coup d’avance, qui fait que La Tempête se dévore et offre une expérience de lecture si plaisante.


Face aux grandes tragédies de Shakespeare, je pense que La Tempête parvient à offrir un texte moins éprouvant et plus accessible que bien d’autres textes. Moins philosophique aussi peut-être qu’un Hamlet, moins complexe que les drames historiques, sans pour autant perdre le sentiment de de l’urgence face aux dangers, d’aspect grandiose du style shakespearien, ni même la réflexion très fine de ce maître de la psychologie humaine, La Tempête est donc à mon avis un très bon livre pour profiter rapidement du génie de l’Auteur Anglais par excellence.

mavhoc
8
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le 17 nov. 2024

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