Venez. Je vais vous raconter une histoire.

Je suis la Mort et je vais vous raconter l’histoire de Liesel. Avec les livres, Liesel découvre le pouvoir des mots et le secret d’Hitler ; avec moi, elle découvre les couleurs sombres, l’immobilité, le froid. Écoutez-moi, je vais vous raconter son histoire.

Molching, petite ville près de Munich, où la vie se replie sur elle-même, resserrée à l’extrême, où les couleurs du ciel sont hallucinées par les bombes et les fumées, où la terre prend l’odeur des corps… Où les mots se révèlent à Liesel, qui, du haut de ses dix ans, découvre la guerre et la lecture.

On y retrouve une Saumensch, un accordéon, un garçon aux cheveux couleur citron, un autre aux cheveux comme des plumes, un boxeur juif, Mein Kampf, un ciel bleu, « avec un gros nuage allongé qui ressemble à une corde, et, au bout de cette corde, le soleil [qui] fait un trou jaune… » et beaucoup de couleurs.

La Voleuse de livres, le roman d’un maître. En donnant la parole à la Mort pour raconter l’histoire personnelle dans la grande Histoire, Markus Zusak enjambe avec habileté les lieux communs de la narration pour ce genre de récit et se meut avec aisance avec l’omniscience de sa narratrice. Si ce n’était que cela, Markus Zusak entrait seulement dans les Éphémères (lien), mais la Mort nous implique, nous titille, nous dérange.

Elle nous fait voir tous les tons de gris qui habitent les cœurs des hommes. Voici, nous dit-elle, comment le régime nazi prend place dans leurs âmes, comment la pression sociale, la suspicion, les menaces et la peur poussent chacun de nous à collaborer, plus ou moins activement, au fascisme. Chaque détail compte dans l’apparence ; à tout moment, il faut prouver sa soumission au nazisme.

Avec Liesel, c’est la difficulté de vivre qu’on appréhende : l’incertitude du lendemain, le rationnement, les denrées rares, voire épuisées, les nuits dans les abris. On découvre aussi comment l’adolescente trouve à être heureuse parmi la misère et les décombres ; l’enfance est unique, la sienne sera de ces couleurs-là : rouge de sang, jaune de l’étoile des juifs, noire de la croix gammée...

La suite de la critique sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/la-voleuse-de-livres-markus-zusak-a80136596
Lybertaire
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Pérennes

Créée

le 17 oct. 2012

Critique lue 274 fois

1 j'aime

Lybertaire

Écrit par

Critique lue 274 fois

1

D'autres avis sur La Voleuse de livres

La Voleuse de livres
Aelyse
8

Simplement humain

Peut-être que j'en attendais trop. J'ai été séduite immédiatement par l'idée d'employer la Mort comme narratrice, et par la construction maîtrisée du roman: j'adore quand l'auteur me prend par la...

le 11 mai 2013

14 j'aime

La Voleuse de livres
David_Benoit
4

Cet ouvrage aurait-il volé sa note ?

Eh bien non ! Désolé mais je n'ai pas adhéré. C'est pourtant bien la première fois que je suis déçu par un livre porté aux nues par la sagesse populaire sur Sens Critique. J'aime beaucoup me laisser...

le 26 déc. 2014

2 j'aime

La Voleuse de livres
marylene-1
10

L'histoire d'une Saumensch et d'un Saukerl

En cherchant des informations sur Markus Zusak, l'auteur de "La Voleuse de Livres", j'apprends que ce dernier est spécialisé dans la littérature pour enfants et jeunes adultes. Considérons alors qu'à...

le 15 août 2014

2 j'aime

Du même critique

Les Jeunes Filles
Lybertaire
10

« Dans quels phantasmes elle vit ! »

Écrire les relations entre les hommes et les femmes, rien de plus délicat ! Montherlant est un maître en la matière : jamais faux, toujours drôle, voire cynique, il se pose en observateur des mœurs...

le 29 août 2012

9 j'aime

3

Sociologie de la bourgeoisie
Lybertaire
8

Une classe mobilisée et dominante

Si la lutte des classes n'existe plus au sens marxiste, la bourgeoisie est la seule classe sociale à avoir conscience de soi, de ses intérêts et de ses limites. La bourgeoisie et la noblesse...

le 18 avr. 2012

9 j'aime

8

Propaganda
Lybertaire
8

"Des dirigeants invisibles contrôlent les destinées de millions d’êtres humains"

Il y a des thèmes dont on parle peu, à tort. La propagande est de ceux-là. Qu’est-ce que la propagande ? Pour Bernays, la propagande regroupe un ensemble de techniques visant à manipuler l’opinion...

le 29 mars 2013

8 j'aime

4