Une romancière belge agite le Landerneau littéraire en cette période de rentrée. Ah, oui, et en quoi c'est nouveau puisque quasi permanent depuis plus de 20 ans ? C'est que l'auteure en question n'est pas la chapeautée que l'on connait mais une voix nouvelle qui répond au nom d'Adeline Dieudonné. La vraie vie (pas fameux, ce titre) est un premier roman exquis et atroce qui fait mal et du bien, pendu que l'on est aux basques d'une narratrice, 10 ans au début du livre, pendant 6 étés consécutifs. Rarement un tel dosage d'obscurité et de lumière aura été concocté pour aboutir à un ouvrage scénarisé comme un thriller implacable à la fois réaliste et sensible à l'imaginaire et transgressif jusqu'aux extrêmes limites à ne pas dépasser pour sombrer dans le sordide (ce que My Absolute Darling, par exemple n'a pas réussi, avis personnel). La vraie vie est un roman de survie, d'une fillette qui devient adolescente sans sas de décompression, au milieu d'un enfer familial où s'impose un père imprévisible et violent avec pour victime directe une mère éteinte (une "amibe"). Quant au petit frère de l'héroïne, il est menacé par les forces du mal et c'est la mission de sa soeur que d'essayer de le sauver. Bien d'autres éléments entrent en ligne de compte dans ce roman d'une densité folle et ébouriffant, y compris avec l'éveil de la sensualité de l'adolescente. Le livre culmine avec une traque en forêt qui rappellera aux cinéphiles Les chasses du comte Zaroff voire La nuit du chasseur. Ceci avant un final un peu appuyé, presque grand-guignolesque, seul éventuel bémol à apporter au bonheur de lecture. Car bonheur il y a à cheminer dans La vraie vie, un peu sadique parfois, mais fascinant de bout en bout et porté par une écriture sans esbroufe mais immédiatement efficace. Conclusion : là où il y de la hyène, il peut y avoir du plaisir (remarque uniquement compréhensible par ceux qui auront lu !).