Les aficionados de Stephen King attendent avec impatience ses recueils de nouvelles, qui constituent souvent la face la plus enthousiasmante de son œuvre foisonnante. "Le Bazar des Mauvais Rêves" est pourtant une petite déception, peut-être la première dans le genre, et confirme ce que les derniers romans du maître de Bangor laissaient craindre, c'est-à-dire un affaiblissement indéniable de son imagination. D'ailleurs, la majorité des nouvelles compilées ici ne sont pas d'essence "fantastique", mais constituent plutôt un portrait pointilliste de la société américaine, ou en tout cas de ses classes sociales les plus populaires - celles que chérit Stephen King depuis toujours, et dont il est le peintre dans la plupart de ses romans (L'illustration la plus symptomatique de ce parti pris est "Feux d'Artifices Imbibés" qui se révèle complètement réjouissant malgré sa prévisibilité). Les nouvelles fantastiques s'avèrent d'ailleurs souvent défaillantes, King échouant à exploiter complètement le potentiel de son idée initiale, ou à les conclure de manière vraiment frappante : "Mile 81" qui ouvre le livre est un soufflé appétissant qui retombe assez tristement, "Ur" enthousiasme avant de se terminer d'une manière terriblement anodine, "Nécro" n'a pas réellement de conclusion, etc. On remarquera toutefois que King est désormais particulièrement obsédé par la Mort, préoccupation logique alors que les années défilent, offrant ci et là des éléments de réflexions stimulants, comme dans "Après Vie", considérations particulièrement pessimistes sur l'inévitabilité du Destin. Au final, les deux aspects les plus passionnants du "Bazar des Mauvais Rêves" sont néanmoins les "insights" de King sur la manière dont naissent les histoires dans son esprit, qui réjouiront quiconque a caressé un jour le rêve d'écrire, ainsi que ses tentatives souvent réussies de reproduire le style d'un confrère écrivain, qui témoignent de la maîtrise stylistique de celui qui est de moins en moins un simple "écrivain fantastique". Terminons en soulignant que la meilleure nouvelle du lot est la dernière, "le Tonnerre en Été", simple mais particulièrement bouleversante, qui nous permet de refermer cet ouvrage irrégulier sur un plaisir intense. [Livre lu en anglais, critique écrite en 2017]