La réputation de Poe ou de sa nouvelle Le Chat noir n'est plus à faire. Pour autant, je vais tout de même me permettre d'en parler à mon tour, car cette œuvre mérite selon moi encore plus de louanges qu'elle n'en reçoit déjà. En effet, cette histoire est un classique du genre fantastique et ce n'est pas pour rien : je ne lui trouve aucun défaut. Je n'en suis pas à ma première histoire de Poe et son style d'écriture me plaît beaucoup, je ne suis donc peut être pas pleinement objective mais il me semble quand même difficile de ne pas aimer la nouvelle ou de la trouver ennuyeuse. Le fait, selon moi, que l'histoire soit courte rend le tout plus intense : il n'y a pas un moment où je ne fus traversée par une émotion forte. Deux sentiments se succédait en moi à la lecture de l'ouvrage. D'abord la colère, car le narrateur impulsif ne ressent pas de culpabilité face à sa violence gratuite. Puis le karma intervient : le narrateur est indirectement puni par un tourment qui ne le quitte plus et la colère du lecteur laisse alors place à la satisfaction de le voir payer pour avoir obéi à ses pulsions. Au fur et à mesure du temps on observe une gradation des crimes du narrateur qui croît en même temps que les punitions qu'il reçoit : il panique et doute, il n'arrive plus à distinguer le réel de l'irrationnel. Ce cauchemar permanent dont il souffre provoque chez le lecteur une jouissance encore plus grande que s'il avait été puni par la loi. La colère qui brûle à l'intérieur du lecteur atteint son paroxysme après le meurtre de la femme du narrateur : la fierté qu'il ressent d'avoir si bien caché le corps vient susciter nos propres pulsions, un désir de vengeance naît en nous comme si on faisait partie de l'histoire, on ne veut plus être spectateur de ce qu'il se passe, mais le faire payer nous-même. Ainsi tout au long de l'histoire l'échange permanent entre colère et satisfaction se ressent comme une vague qui part et revient jusqu'au tsunami finale : l'arrestation du narrateur.
Là est pour moi tout le talent et l'originalité de Poe : sa capacité à éveiller en nous ce qu'on aurait jamais pensé ressentir simplement en lisant une nouvelle. Sa plume est telle que je n'essaie même pas de séparer le rationnel du fantastique pour comprendre la réalité. En effet j'ai tendance à toujours vouloir expliquer les choses, et lorsque l'auteur ne le fait pas et nous laisse en plan avec nos questions cela peut baisser mon estime pour une œuvre. Poe est le seul qui me fait pleinement apprécier son histoire alors que beaucoup de questions restent en suspens.
Pour les amoureux de cette nouvelle comme moi, je recommande également une autre de ses histoires lugubres Morella.