Un roman bicéphale, incapable de choisir entre sa face fantastique et sa face féministe, qui, voulant donner autant d'importance à l'une et à l'autre, ne sait plus où donner de la tête. Après de nombreux chapitres introductifs permettant la mise en place de l'intrigue et la présentation des personnages, spécifiquement de Julia et de la Grande Stéphane, dont les rôles sont finalement minimes au moment du dénouement (elles ne sont là que pour incarner la voix militante de l'autrice), le récit se perd dans l'entretien exagéré du mystère : le propos est confus parce qu'il refuse la révélation précoce et parce qu'il a l'ambition de relater un conte merveilleux. Cette association ratée de cause féministe moderne et de récit légendaire moyenâgeux crée un effet anachronique curieux, qu'accentue un niveau de langue instable : le familier (marqué par la répétition trop nombreuse de « les gosses ») et le soutenu (« la mélopée ») se côtoient dans une même phrase — c'est d'autant plus fâcheux que la focalisation est changeante, elle aussi, et que le style refuse le discours direct : il faut donc que les dialogues rapportés, dans une langue orale, jouxtent les temps de narration, voire se fondent en eux. Un ensemble biscornu, sans harmonie, qui aurait en fait mérité d'être divisé en deux histoires distinctes : la romance homosexuelle et l'enquête surnaturelle.