And how can the dead be truly dead when they still live in the souls of those who are left behind?
23 ans. Rendez vous compte ! Carson McCullers a écrit ce roman, d'une grande richesse et d'une maturité incroyable, à 23 ANS. Je n'en reviens toujours pas.
Cela commence avec ce titre magnifique, tiré d'un poème de Fiona Macleod. Malheureusement, le roman n'est peut-être pas à la hauteur de son titre. Je reste sur ma faim. Car ce livre est plein de mystère, plein de non dits et laisse sur un sentiment d'inachevé. Je trouve aussi l'écriture trop simple, trop lacunaire. Loin de moi l'idée de dire que Carson McCullers écrit mal ! Évidemment, son style correspond parfaitement à ce qu'elle veut montrer : la solitude des personnages, leur difficulté à communiquer et à se faire comprendre, la monotonie de leurs vies ratées. Mais cette écriture dénuée de lyrisme, très descriptive, qui s'attache plus aux actions qu'aux émotions m'a beaucoup dérangée.
Ce qui est finalement bien plus intéressant que le style en lui-même, ce sont les thèmes abordés par la romancière. Son ouvrage est extrêmement riche. L'exégèse de tous les thèmes du roman mériterait une thèse. On y parle, entre autre, de l'Amérique des années 30, du racisme, du communisme, de l'adolescence, de la sexualité, de la violence, de l'amitié, de la mort et évidemment, de la solitude. Bref, avec tous ces personnages et toutes ces histoires parallèles, Carson McCullers a créé un roman d'une infinie richesse.
SPOILER
Les personnages de The Heart is a lonely hunter sont absolument fabuleux. On découvre les vies de Mick, Biff, Jake et Docteur Copeland. Leurs destins se croisent, s'éloignent et se retrouvent toujours grâce au très énigmatique John Singer. Il est muet, objet de tous les fantasmes et spéculations et surtout le seul à pouvoir comprendre ces personnages. Singer est terriblement touchant et sa mort bouleversante. McCullers a une grande empathie pour lui. On la sent aussi très proche du personnage de Mick Kelly, adolescente garçon manqué, passionnée par la musique mais extrêmement esseulée. Tout au long de ces 300 pages, on s'attache énormément à ces personnages. Malheureusement, leurs rêves ne sont que des illusions, aucun d'entre eux n'accède au bonheur et ils finissent tous comme ils ont commencé : dans la solitude, réelle ou purement psychique.
FIN DU SPOILER
C'est un livre très triste, qui rend mélancolique, amer, désabusé sur la vie. La fin du roman laisse peu de place à l'espoir. J'ai été extrêmement émue par le docteur Copeland. Il lutte pour la cause des Noirs, dans ce Sud américain où le racisme, la ségrégation, les discriminations sont omniprésents. Dans un passage absolument grandiose du roman, il fait un discours auprès de ses frères Noirs, les encourageant à la révolte et citant Marx à tout va. Ses paroles sont épiques, bouleversantes et assez osées pour l'époque. Écrire tout cela, dans le Sud raciste des années 30...! McCullers frappe fort. Elle offre un tableau très pessimiste de son époque, caractérisé par la misère, l'exclusion, la montée du fascisme en Europe. Mais il y a bien quelques notes d'espoir, d'humanité, incarnées par le généreux et bienveillant Singer.
Je recommande vivement ce roman. N'y cherchez pas un grand style d'écriture, mais la pure émotion.
"There was neither beginning nor end to this sorrow. Nor understanding. Always he would return in his thoughts to this white man who was not insolent or scornful but who was just. And how can the dead be truly dead when they still live in the souls of those who are left behind?"
(Je m'en vais de ce pas lire quelque chose d'un peu plus gai.)