Le Comte de Monte-Cristo est une œuvre comme on les aime, un classique qui contient tous les ingrédients du chef-d’œuvre ; il sait tisser une trame relativement riche quoique pourtant simple à appréhender, il dresse une galerie de personnages tous captivants mais aisément identifiables, il sait alterner les phases rythmées avec des séquences plus descriptives et lentes, il sait aussi varier les styles et les thématiques abordées (philosophie, religion, morale, politique, romance, poésie...). C'est tout simplement une leçon de savoir-écrire un roman passionnant.

L'intrigue, on l'a dit, est d'une simplicité enfantine de prime abord : Edmond Dantès se retrouve derrière les barreaux par la faute de plusieurs personnages aux motivations diverses, réussit à s'échapper, devient heureusement riche et met en place une lente vengeance à l'encontre de ses pourfendeurs. Et pourtant Dumas parvient à étoffer cette histoire de base en ne centrant par son récit uniquement sur le personnage principal, d'abord ; ensuite en gardant quelques révélations qui se dévoileront au fil du récit, en obscurcissant parfois les intentions du comte, et en faisant bien sût évoluer ce personnage au travers de ses pérégrinations.

Pourtant, encore une fois, le personnage de Monte-Cristo n'est pas l'unique atout de ce grand roman, et toute la qualité, la valeur d'une histoire aussi longue se doit de reposer sur des personnages de prime abord secondaires, mais pourtant indispensables. Aucun n'est oublié par Alexandre Dumas, du valet au fiston, de la maîtresse de maison à l'amie pianiste de sa fille, du bandit corse ou romain à l'aubergiste plié aux quatre volontés de ses clients ; il est hallucinant de constater que tout un chacun joue un rôle prépondérant, que rien n'est à jeter dans cette assemblée de personnages parmi laquelle il serait aisée de se perdre, mais qui pourtant jamais se montre fouillis et indiscernable.

Et puisque l'on a qualifié l'intrigue de longue, il convient de louer l'alternance remarquablement maîtrisée entre les moments de tension (les dialogues entre le comte et ses ennemis, lorsque le premier nommé les taquine sous couvert d'une politesse et d'une flatterie merveilleusement affectée), d'intelligence (les conversations avec l'abbé, la retenue en otage de Danglars chez Luigi Vampa) et de tranquillité (certaines pauses descriptives assez courtes, certaines pauses dans la frénésie du déroulement de la vengeance). Tout cela est d'autant plus nécessaire que l'ensemble tient sur 1400 pages !

Enfin toute grande œuvre se doit de proposer une foule de considérations politique, morale, religieuse ; d'aborder des thématiques romantiques, poétiques et de multiplier ainsi les sujets au sein d'un ensemble que l'on pourra résumer pourtant de manière concise.
Et là encore Le Comte de Monte-Cristo s'en sort très bien, construisant sa trame autour de faits historiques tels que la restauration de la monarchie après la tentative de retour de Napoléon, ne cessant d'accompagner Edmond Dantès dans son cheminement personnel (les raisons, les conséquences et les moyens de sa vengeance, son rapport à Dieu).
C'est tout juste si l'on pourra reprocher à l'auteur de ne pas se montrer si engagé que certains de ses contemporains dans cette voie, de ne pas aller plus loin dans sa vision de Dieu, de ne pas explorer encore plus en avant les rapports humains.
Une exigence qui traduit tout simplement l'envie du lecteur d'en avoir toujours plus !

Quand le livre vient à se fermer, il se souvient avec Edmond Dantès du chemin parcouru, des épreuves, des personnes rencontrées ; il pleure sur le cadavre de l'abbé Faria, sur la perte de Mercédès, sur la souffrance de son père, il ouvre son cœur à l'amour de la famille Morel, à leur reconnaissance, il se rappelle des histoires captivantes de bandits, du charisme de Luigi Vampa, il voit disparaître sa haine des bourreaux originels.
La dernière page tournée, c'est tout un pan de vie qui vient de défiler.

Des dizaines d'années qui en valent des siècles...
ngc111
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le 22 avr. 2013

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