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António Lobo Antunes signe avec Le Cul de Judas, paru en 1979 au Portugal, une œuvre sans concession sur la guerre des colonies portugaises, en particulier en Angola. Ce Os Cus de Judas parle du vécu de l’auteur en tant que médecin dans l’armée dans les années 1971 à 1973. Á travers un homme qui se raconte à une femme dans un bar à Lisbonne, António Lobo Antunes décrit le cauchemar de la guerre. Un médecin de guerre perdu dans les méandres de la stupidité humaine pendant vingt-sept mois d’enfer.


Le Cul de Judas a cette force que seul le vécu peut traduire. Une vérité, une authenticité qui vous prend et vous malmène dans tous les sens. On sent que l’auteur à profondément été marqué par son vécu durant la guerre coloniale en Angola. Un traumatisme qu’il lance avec fracas en fustigeant la stupidité de la guerre mais aussi le pouvoir dictatorial, la hiérarchie de l’armée lorsque ce n’est pas la police politique (P.I.D.E.) qui est pointé du doigt ou bien ces hommes qui font de l’argent avec la guerre. Il y parle de la souffrance, de l’ennui, de la sauvagerie, des conséquences désastreuses sur la population locale avec un mordant emprunt de dégoût et une rage communicative.


L’auteur dénonce. Il dénonce dans les vapeurs d’alcool un conflit absurde dans un trou du cul du monde, le trou pourri dans lequel il fut jeté et oublié avec toute une génération. Cette satire de la guerre est crue et violente. Une véracité iconoclaste riche allant à l’encontre d’un quelconque classicisme connu. Ici le fond et la forme qu’emploie António Lobo Antunes est d’un anticonformisme parfois déroutant. Son style pourrait en dérouter plus d’un, un personnage se raconte à la première personne en un long dialogue sans interaction avec un interlocuteur. Il y a une forme presque poétique dans la manière de faire exprimer son narrateur. Chaque mot, chaque phrase sont autant d’image qui nous traverse de part en part en laissant une marque indélébile.


Le Cul de Judas est un roman sur une expérience, une prise de conscience du Portugal qui n’épargne pas non plus la classe bourgeoise dont fait partie l’auteur et qu’il égratigne. On sent un individu qui à l’image de son personnage est passé d’un état de naïveté à un homme subissant sur sa personne les conséquences d’un traumatisme. Un homme conscient du monde dans lequel il vit, un homme qui se sent trahit par son propre pays alors qu’il voit mourir autour de lui. Rien que pour ce portrait et son sujet très peu traité (les guerres coloniales), Le Cul de Judas mérite d’être lu. C’est une œuvre forte qui apporte un regard réaliste et méconnu d’une partie de l’Histoire portugaise. Splendide de noirceur.


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le 6 août 2013

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