Un ado aux cheveux ébouriffé rêvant de folles chevauchées se prenant certains jours pour le général Lasalle chargeant une dernière fois à Wagram (moi) emprunta un jour au CDI de son lycée, séduit par le titre, ce livre dont il ignorait tout. Il l'ouvrit et fut incapable de s'en extraire avant de l'avoir fini. Sans cesse il se confronta à son désir d'héroïsme espéra sans cesse que les fameux tartares (dont il connaissait depuis le collège la sauvagerie grâce à Michel Strogoff) surgissent. Il partagea l'attente l'ennui et fut triste à la fin quand enfin il se prépare quelque chose, le héros meurt. Il referma le livre et reprit ses récits d'aventures sans pour autant complètement oublier le lieutenant Drago et son énigmatique sourire final. Il ne relut jamais le désert mais conserva toujours beaucoup d'intérêt pour Dino Buzzati dont il adapta au théâtre "la fameuse invasion de la sicile par les ours". Ce n'est que plusieurs décennies plus tard il comprit enfin qu'en douceur le roman lui avait offert une sorte de frère qui comme lui rêvait d'aventure et ne trouvait qu'un morne réel monotone. Contrairement au désespérant "Albatros" de Baudelaire le récit de Buzzati ne m'a jamais conduit au désespoir mais au contraire toujours revigoré. Pourquoi ? Je ne le sais toujours pas, mais une petite flamme d'espoir traverse sans doute les lignes et aide à ne pas avoir le sentiment désespérant de perdre sa vie.