Les critiques dithyrambiques qui ont fleuri aux quatre coins de la blogosphère au sujet du Dîner m'ont convaincue de m'y plonger à mon tour.
Herman Koch y propose une construction originale qui suit les étapes d'un dîner au restaurant, depuis l'apéro jusqu'au pourboire1. A chaque étape, le lecteur en découvre un peu plus sur cette famille singulièrement agitée.
Le roman commence de façon plutôt cocasse quand Paul dénonce avec justesse et férocité les mœurs chichiteuses du restaurant où il se trouve... Mais au fil des chapitres, la tension monte subrepticement, pour des raisons qui portent de moins en moins à rire, jusqu'à susciter l'inquiétude et, à sa suite, des sentiments plus désagréables encore. Certaines lectrices ont éprouvé un trouble proche de l'écœurement en parcourant les dernières pages de ce livre. Quant à moi, après avoir dépassé le stade de l'inquiétude, j'ai basculé dans les méandres d'une incompréhension grandissante...
Le dîner délivre des valeurs tellement éloignées des miennes que j'ai fini par en perdre mon latin. J'ai eu l'impression de progresser dans une intrigue qui, au lieu de se clarifier, s'obscurcissait de plus de plus. J'ai cru vivre ces phases de repos où vous vous trouvez entre le sommeil et l'éveil, et où vous commencez à prendre vaguement conscience de l'incohérence du rêve que vous êtes en train de faire : frustrant !
Le but d'Herman Koch est sans aucun doute de renverser les perceptions du lecteur et de susciter chez lui un questionnement multiple : jusqu'où irions-nous pour nos enfants? Pour notre famille? Pour nous-mêmes? Pour préserver l'illusion du bonheur ou de la stabilité?
L'auteur réussit selon moi son défi : son livre, personnel et déconcertant, pousse immanquablement à la réflexion.
Cependant, plusieurs choses m'ont empêchée d'apprécier ce roman tout à fait :
- le fait qu'il me largue : je ne supporte pas les zones d'ombre. En dépit des explications que j'ai mendiées et obtenues, je reste dans le brouillard quant aux intentions de certains protagonistes...
- les flashbacks du narrateur où il détourne notre attention du dîner pour ne cesser de dire qu'il n'identifiera pas certains lieux, certaines maladies, etc. Non seulement ces silences n'ont fait qu'accentuer mes interrogations et ma confusion, mais ils m'ont également confrontée à un rythme de narration saccadé, interrompu intempestivement.
En somme, "Le dîner" m'a fait – continue de me faire – réfléchir. Il ne m'a en aucun cas laissée indifférente. Malheureusement, l'état de perplexité et d'énervement auquel il m'a conduite faute d'explicitations ne m'a pas permis de l'apprécier à sa juste valeur...