Plus qu’un simple témoignage, plus qu’un carnet guerre, plus qu’un écrit historique.
Henri Barbusse hisse au rang de littérature le jargon des poilus parce que tous leurs dialogues sont simples, justes, pures et épurés. Le feu saisit avec justesse les atrocités et l’absurdité de la guerre : combien de morts pour la paix ? pourquoi la guerre ? Pour qui ? Contre qui ? Contre des soldats allemands qui vivent dans les mêmes tranchées, emportés dans les mêmes torrents de boue. Cette boue efface la couleur des uniformes et comment alors reconnaître l’ami de l’ennemi ? Cet épisode est le premier souvenir qui me vient en tête :
« Tous ces hommes à face cadavérique, qui sont devant nous et derrière nous, au bout de leurs forces, vides de paroles comme de volonté, tous ces hommes chargés de terre, et qui portent, pourrait-on dire, leur ensevelissement, se ressemblent comme s’ils étaient nus. De cette nuit, épouvantable il sort d’un côté ou d’un autre quelques revenants revêtus exactement du même uniforme de misère et d’ordure. »
Ces pistes de réflexion sur la guerre menée par l’écrivain sont poignantes et tous les dialogues des personnages sont beaux.
Ce livre est une véritable prouesse, il dépasse le réel de la première guerre mondiale, Henri Barbusse transcende son propre carnet d’escouade pour nous amener à lire une poésie des tranchées.