Je n'aime pas les nouvelles. Sauf celles de Maupassant et, désormais, de London. Du génie à l'état pur. "Le Fils du Loup" est la toute première publication de Jack London, celle qui lui valut d'être surnommé le "Kipling du Froid". Par la force évocatrice de sa plume, on est directement immergé dans la violence des grands espaces, loin de tout repère réconfortant.
Dans le Grand Nord canadien, les hommes venus tenter leur chance tentent de survivre face à une nature implacable grâce aux bêtes. L'auteur s'inspire de la ruée vers l'or du Klondike, à la toute fin du 19e siècle, d'où il revint lui-même avec le scorbut et les poches vides... Attention, il n'est pas question de loups ici, les "Loups", désignant les hommes blancs, venus chercher de l'or aux confins de l'Alaska, où -20 degrés est considéré comme une température "douce". Menant une existence rude, esseulés pendant les longs hivers, ils cherchent naturellement à s'unir avec des femmes indiennes, très convoitées. Et cela dans un territoire hostile où il n'est pas rare de voir les chiens de traîneaux s'entredévorer, où l'on découpe en dernier recours le haut de ses mocassins pour les faire bouillir avant de les manger, où l'on doit parfois achever un ami blessé pour survivre soi-même, où les hommes peuvent devenir fous à force d'errer dans ce blanc sans confins à la recherche de nourriture... London nous donne à voir des personnages qui font figure d'exemple, à la loyauté infaillible, dotés d'un courage qui défie l'imagination : des trappeurs qui n'ont pas froid aux yeux, persuadés, en leur fierté mal placée de mâles blancs, que les femmes n'attendent qu'eux.