Des aphorismes pêle-mêle dont on se vantera de connaître le sens alors que la moitié s'adressent à des allemands morts depuis 150 ans, pour des motifs morts avec eux. Jaspers disait que le pire défaut de Nietzsche était d'être "faussement accessible". Je crois que le Gai Savoir tombe malheureusement dans cette catégorie. La phrase mord, certes, et à l'hameçon nous mordons : on est attiré par un des paragraphes, on se dit que c'est "trop vrai", que "même à notre époque ça n'a pas changé", qu'il parle déjà des végétariens ou du manque d'humour... Si vous cherchez un commentateur aride de la société occidentale, vous trouverez votre bonheur, ainsi que des piques aiguisées à sortir pendant un dîner mondain pour montrer à quel point vous êtes cultivé, c'est parfait de ce côté-là. J'ai trouvé là un manque de profondeur, par contre.
Enfin, manque de profondeur, c'est relatif, c'est Nietzsche, quand même.
"L'aphorisme est un feu sans flamme, pas étonnant que nul ne veuille s'y réchauffer" disait Cioran. Ca reste un livre qui fait réfléchir, et qui se prête à la lecture, donc mitigé. Mais mauvais pour Nietzsche.