On est quelques-uns a à avoir cru, au vu de Faillir être flingué, que Céline Minard allait devenir l'une de nos principales romancières avec un style et une originalité que très peu pouvaient égaler. Là-dessus, voici qu'arrive Le grand jeu, qui laisse sans voix, mais pas pour la bonne cause. Qu'est-ce donc que ce livre qui accorde aussi peu d'attention à la narration ? Certes, d'autres écrivains ont su nous passionner en ne décrivant que des impressions ou sensations sans avoir à leur disposition un récit digne de ce nom. Mais dans le grand jeu, il y autre chose qui gêne et c'est le ton. L'histoire de cette recluse volontaire à haute altitude est celle d'une fichue égoïste qui a l'air de penser que rien ne vaut le coup en dehors de ce qui tourne autour de sa petite personne. On cherche en vain un peu d'ironie de Céline Minard vis-à-vis de ce personnage imbu de lui-même et qui a décidé que la fréquentation de la société représentait bien trop d'efforts d'autant qu'elle était plutôt méprisable (la société). Sans doute commet-on l'erreur de confondre Céline Minard avec son "héroïne" mais la romancière l'a bien cherché et on ne peut décemment lui reprocher de chercher la sympathie du lecteur. Qui plus est, la majeure partie du livre est assommante, sans enjeux, avec des descriptions à n'en plus finir des difficultés rencontrées par cette aventurière du moi hypertrophié et ses bonheurs devant son potager. Ah oui, elle rencontre tout de même une étrange ermite au nom chinois avec qui elle partage des soirées bien arrosées. Et puis ? Rien du tout. Tous les chemins mènent au rhum mais ils sont bien escarpés. Le grand jeu n'est pas une purge parce qu'il n'a pas le temps de l'être, il est trop court. Mais c'est tout juste.