Le style d'Alain Fournier est unique et l'inconsistance de ses personnages couplée à ses évocations brumeuses ont tôt fait de nous plonger dans une ambiance onirique.
L'histoire entière est d'ailleurs non sans rappeler un conte ou un récit initiatique même si ici, le merveilleux ne s'impose pas mais émane des choses les plus simples sous la plume délicate de son auteur.
Il y a un peu de l'enchantement des contes de Perrault transposé dans cette campagne française du début du vingtième siècle vivant encore en marge de la modernité et cette nostalgie habite le coeur même du roman et servira de toile de fond pour mener l'intrigue, très simple mais qui nous offrira quelques jolis passages remplis d'émotion. On sent que l'auteur a grandi dans cette campagne et son amour pour elle transparaît à chaque page.
La première partie est impressionnante de maîtrise et le mystère s'installe tranquillement, insensiblement chapitre après chapitre. Je pense avant tout à celui de "la halte" qui est un bijou de narration et de description remplie de cette rare compréhension bienveillante des relations humaines.
Malheureusement,la seconde moitié m'a souvent ennuyé et l'histoire prend par moments une tournure légèrement mièvre mais le livre se rattrape par un final poignant bien qu'assez abrupt.
Pour finir, c'est une oeuvre singulière qui mérite qu'on s'y intéresse ,cependant je ne peux m'empêcher d'avoir l'impression qu'il lui manque un je ne sais quoi , peut être un peu de rythme notamment, en ayant achevé sa lecture.
Le talent d'Alain Fournier était évident et s'il n'était pas mort aussi tragiquement dans la fleur de l'âge au début de la première guerre mondiale, je suis certain qu'il aurait paufiné son art car il avait tout d'un futur grand.