Silicose vallée

Le grisou tue encore. En Chine ou en d'autres pays lointains. Mais en France, les houillères font désormais partie de l'histoire. Depuis plus de 20 ans dans la région Nord-Pas de Calais, qui a payé un lourd tribut au charbon : du sang, de la sueur et des larmes. Le jour d'avant dit toute la souffrance des mineurs et de leurs familles, la solidarité, la fierté et le courage aussi. Un hommage poignant. Les mines ont avalé des vies, elles sont également le symbole de l'exploitation éhontée d'hommes pour produire toujours plus au mépris des règles les plus élémentaires de sécurité. Le livre de Sorj Chalandon est né de la colère et de la révolte : jamais la tragédie de décembre 74 à Liévin n'a donné lieu à un procès. Comme si c'était le mauvais sort qui était seul responsable. Phrases courtes, sèches et précises : le style de Sorj Chalandon exprime une sourde rage à l'aune du désir de vengeance de son personnage principal, un homme vieillissant qui trimballe une tristesse incommensurable en bandoulière. Avec des souvenirs d'enfance qui ont marqué l'homme en devenir dans cette silicose vallée. Un frère plus âgé, mort au fond du trou, un père dévasté, suicidé quelques années plus tard. Le jour d'avant est l'histoire d'une vengeance, longtemps ruminé. Du moins c'est que le lecteur comprend jusqu'à mi-roman avant qu'un twist surprenant ne fasse basculer le livre vers d'autres rives, plus psychologiques. Mensonges à soi-même, remords et culpabilité : les thèmes de prédilection de Chalandon explosent comme un gaz létal dans ce qui est peut-être son meilleur livre à ce jour. Dense et poisseux, lumineux et sombre comme les tréfonds de l'âme humaine.