Silicose vallée
Le grisou tue encore. En Chine ou en d'autres pays lointains. Mais en France, les houillères font désormais partie de l'histoire. Depuis plus de 20 ans dans la région Nord-Pas de Calais, qui a payé...
le 28 oct. 2017
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Sorj Chalandon est né à Tunis en mai 1952. Il a été journaliste au quotidien Libération de 1973 à 2007 et a obtenu le prix Albert-Londres en 1988.
Écrivain, il a aussi publié sept romans chez Grasset, dont Une promesse, qui a reçu le prix Médicis en 2006 et Le Quatrième mur le Prix Goncourt des lycéens 2013.
Depuis août 2009, Sorj Chalandon est journaliste au Canard enchaîné, ainsi que critique cinéma.
En 2008, son roman Mon traître s'inspire de son histoire personnelle. Ce roman obtient le Grand prix du roman de l'Académie française en 2011.
En 2017, il publie le roman Le Jour d'avant, sur la catastrophe minière de Liévin-Lens qui a fait 42 morts le 27 décembre 1974. Lorsqu’on lui demande comment est né le livre, il répond : « En décembre 1974, je travaillais au journal Libération et l’histoire des 42 m’avait bouleversé. Elle était pour moi l’illustration tragique du fait que la fatalité n’existait pas. En 1984 – dix ans plus tard – lors de la longue grève des mineurs britanniques, je m’étais installé dans le village de Brampton (Yorkshire), là où tout avait commencé. Et chaque mot de mes reportages d’alors était à la fois chargé de cette actualité et hanté par les 42 hommes de Liévin. Rendre compte du combat des uns était rendre hommage aux autres. Hommage à cette armée de simples gens. Et à leur dignité. » Et lorsqu’on lui demande de dire un mot pour donner envie de lire "Le jour d'avant", il répond mystérieusement : « Méfiez-vous des histoires trop belles. Méfiez-vous des choses trop simples. Ce n’est pas un livre sur la vengeance que vous aurez entre les mains mais un roman sur la culpabilité. J’aime Michel. Il me touche profondément car je lui ai légué ma colère. Mais c’est une âme noire, pas une gueule noire ».
Mais alors quel est le sujet du roman ?
Sorj Chalandon : « Michel Flavent, petit frère d’un mineur du Nord, passe son enfance à espérer le rejoindre au fond. Comme lui, il veut faire partie de l’armée des gueules noires, partager leur bataille pour le charbon, leur courage.
Le 27 décembre 1974, Joseph, frère de Michel, est mortellement blessé dans la dernière grande catastrophe minière de France. Quarante-deux morts, à la fosse 3 bis de Liévin. Coup de grisou. Morts parce que toutes les précautions n’avaient pas été prises, parce que la sécurité de ces hommes n’avait pas été assurée. Morts pour des raisons d’économie. Morts parce que ce quartier de mine allait fermer et qu’il n’avait pas été dégrisouté, ni contrôlé. Alors Michel Flavent n’ira pas à la mine ».
Sorj Chalandon s’identifie complètement à son héros : « C’est moi qui vous raconte comment j’ai fui le Nord, mon coron, mon horizon de terrils. Comment je suis allé vivre et travailler à Paris. Comment j’ai rencontré Cécile, ma femme. Comment, ma vie entière, j’ai fait croire à tous que j’étais heureux. Et comment, à la mort de Cécile, après toutes ces années passées, j’ai décidé de rentrer au pays pour me venger de ceux qui avaient tué mon frère. Ceux qui avaient joué avec la vie des mineurs. Ceux qui les avaient humiliés et opprimés ».
Dans ce livre à la première personne, l’auteur s’identifie tellement à Michel Flavent qu’il est Michel Flavent, littéralement. C’est une autobiographie qu'il nous est donné de lire. Pas à pas, on suit la bouleversante tempête de sentiments qui ébranle le jeune Michel : « …mon cœur d’enfant avait cessé de battre. La mort de Joseph m’avait fané. Ma jeunesse était vieille. » Avec une sensibilité bouleversante et une vérité hurlante Sorj-Michel nous parle de l’Amour Fraternel qui unit, au-delà du tombeau, ces deux frères fracassés par le destin. Toute sa vie Michel vivra hanté par la mémoire de Joseph au point de lui consacrer un véritable Autel de mineur.
Si le cœur de Michel semble simple et désespéré, la plume de Sorj sait se faire, tour à tour, complexe, imprévue, poignante, violente, émouvante, accusatrice mais toujours palpitante. Le dernier quart ne peut être lu que d’une traite (prenez vos dispositions !) tant on est captivé. Je n’en dirai rien de plus, mais sachez que Michel ne trouvera le repos qu’à la dernière ligne !
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Créée
le 1 juin 2018
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