Claude Lantzmann est l'homme qui a analysé la Shoah, après une enquête-fleuve, en vue de la montrer, de manière froide et objective. Il est aussi celui de l'anticolonialisme, de l'engagement pour la gauche radicale, avant de procéder à un inventaire de l'action de l'URSS, non sans un certain pincement.
Ce philosophe engagé, cet acteur engagé, se livre, pour mieux faire comprendre comment se meut un tel personnage, avec un constant mouvement pendulaire allant de l'humilité à une certaine forme d'immodestie, assez aisément pardonnable. Ce témoignage s'avère donc très important, pour mieux saisir, d'un point de vue actif, l'esprit et l'ambiance d'une époque. Seules les longues descriptions de sa liaison avec son cher Castor, Simone de Beauvoir, m'apparaissent franchement d'un goût discutable, d'une impudeur assez franche.
J'ai été impressionné par la résonance hautement polémique en Pologne de la sortie de Shoah, en raison de la diffusion de nombreux et longs témoignages ouvertement antisémites. Il a fallu du temps pour faire admettre qu'il ne s'agissait pas de toute la Pologne et que ces discours étaient utiles pour comprendre un phénomène dur à entendre et à saisir : il fallait arriver à écouter l'indicible.
Cet ouvrage a donc une grande importance.