Rien n'est jamais anodin chez Balzac. Rien n'est jamais gratuit dans son écriture. Pas même le caractère éminemment ennuyeux du Lys dans la Vallée – qui rompt avec la tradition balzacienne des romans si complexes qu'ils en sont captivants.
Il s'agit, paraît-il, d'un « roman d'éducation », qui partage avec son homologue flaubertien qu'il a inspiré, L'Education sentimentale, une platitude confinant le vide signifiant. Qu'on ne s'y méprenne, il y a fort à parier que Balzac ait savamment orchestré cette symphonie littéraire « lente et douloureuse »...
Le fait que Balzac ait été payé au nombre de pages peut expliquer la dilatation de la narration en descriptions toutes aussi longues que redondantes. De quoi permettre à Balzac de surcharger son propos d'un lyrisme omniprésent, qu'il en devient surfait.
La lenteur de la progression dans l'intrigue me donne l'impression que Balzac ait retravaillé le roman, jusqu'à ce que ce dernier perde de son efficacité. Balzac a en effet réécrit son Lys dans la Vallée d'après ses exigences, nées d'un agacement envers le roman de Sainte-Beuve, Volupté. Le Lys dans la Vallée serait comme le « fils littéraire » de Volupté, un exercice de style de haut niveau, mais duquel émane une sensation d'artificialité.
Enfin, il semblerait que Balzac ait voulu faire du couple Mme de Mortsauf-Félix le mythe du duo impossible. L'écriture est totalement focalisée sur ces deux personnes qui, il faut le dire, entretiennent une relation quasiment inchangée du début jusqu'à la fin du roman... Peut-être pour montrer que l'amour entre ces deux personnages, à l'évidence exceptionnel, dépasse les contingences humaines ?
Au-delà de cette histoire un peu lassante, j'ai été frappée par l'exceptionnelle analyse des personnalités qui composent le drame du Lys dans la Vallée. Précision quasi-scientifique, qui apporte réalisme et réhabilite à une intrigue moyennement crédible.