Après avoir triomphé lors de la Seconde Guerre mondiale, l'Allemagne domine les trois quarts du globe, laissant le Pacifique et la côte Ouest américaine au Japon. Dans cette réalité uchronique, l'assassinat de Roosevelt, entre autres causes, a fait perdre les Alliés, plongeant le monde dans une ère entrainée par le nazisme ; mais dans ce monde, on évoque aussi une autre réalité, celle que décrit un livre de fiction à la mode, dans laquelle ce sont les États-Unis et les Russes qui ont su défaire leurs adversaires et se sont partagés le gâteau.
Ce point de départ génial donne lieu à un roman un peu déroutant, car on suit tour à tour différents personnages aux occupations très personnelles, banales, aucun héros surpuissant, aucun révolutionnaire acharné, seulement des hommes et des femmes pris dans leurs certitudes, leur travail, et la violence sous-jacente de la société. Pourtant, à mesure que les pages se tournent, on voit naitre chez chacun d'eux le désir de changement. Qu'il soit conscient ou non, volontaire ou forcé, ils en arrivent tous au tournant de leur vie où ce changement s'impose. C'est l'instant où la routine ne fonctionne plus, où la paresse s'efface, où le destin se met en marche et le hasard s'affole. C'est alors que se révèlent les héros discrets, les résistants, qui soudain savent dire non à l'envahisseur, qui, obéissant à un instinct violent, s'imposent contre l'oppression ou la fatalité, qui apprennent à risquer leur honneur et leur vie pour en sauver d'autres. Enfin, que penser de cet homme, reclus dans son Haut Château, le romancier mystérieux, recherché par les Allemands, qui a renoncé finalement à sa protection pour vivre sa vie avec sa famille et ses amis, affrontant l'obscurantisme pullulant grâce à sa simple existence. Enserrés dans l'étouffant filet de la dictature, on voit ressortir un peu partout de minces filets d'espoir qui en perceront les failles.