Le Mars Club
6.8
Le Mars Club

livre de Rachel Kushner (2018)

« Des fleurs qui s'ouvrent en mars, on n'a que le regard » dicton

Il est évident que lorsqu’une prisonnière est condamnée à une double perpétuité et que sa prochaine comparution devant la commission de probation aura lieu dans trente-sept ans, l’avenir s’annonce sombre.
C’est le cas de Romy Hall, 29 ans, jugée pour assassinat. Et c’est elle que le lecteur va suivre, sous la plume de Rachel Kushner, en même temps que le quotidien d’autres détenues proches d’elle.
Ce livre nous fait revivre la vie « d’avant » de Romy, lorsqu’elle était stripteaseuse au Mars Club à Terderloin, quartier de San Francisco, bien loin de Nob Hill ou Marina District, en alternance avec sa vie de prisonnière à Stanville, Californie. Une foule de personnages viennent tour à tour s’imbriquer dans ce mur qui constituera désormais sa seule vison du monde extérieur. Les souvenirs, souvent douloureux, se mélangent avec la dure réalité d’une prison de haute sécurité et ses règlements absurdes, ses inspections humiliantes, ses hurlements, ses insultes, ses coups, ses cris et ses pleurs.
Le récit est haché, voire décousu, sans chronologie distincte. On passe d’un personnage à l’autre sans toujours saisir le lien qui l’unit à d’autres et l’auteur se soucie rarement de nous le rappeler. L’écriture est simple et la narration au présent qui est volontairement dépouillée lorsque l’auteure fait s’exprimer Romy est une logique qui peut devenir lassante autant que cette impression de survol bienveillant des personnages que nous offre Rachel Kushner. Elle ne semble éprouver pour eux aucun attachement particulier. Le lecteur finit par éprouver cette même apathie et les suit, curieux et attentif, sans tendresse, ni haine, comme s’il les observait du haut d’un mirador. L’auteure aura eu, en tout cas, le bon goût de ne pas sombrer dans un pathos de mauvais aloi poussant le lecteur à larmoyer sur le sort de ces prisonnières, arguant qu’elles sont souvent victimes avant d’être coupables. Ce qui peut être vrai au demeurant.
Et c’est là, sans doute que la déception se tient parce qu’au final ce livre n’est pas un grand roman mais n’est pas non plus un témoignage violent du monde carcéral, ni un plaidoyer contre la réclusion, ni même une réflexion sur l’enfermement ou un appel à l’abolition des peines incompressibles. Culpabilité, aveu, repentir sont des sujets qui n’effleurent pas la pensée de l’auteure. Et ce n’est pas non plus un livre « coup de poing » sur l’univers carcéral féminin comme l’était par ex « Meurtres pour rédemption »
Bref, un roman convenu qui ne sert aucune cause.

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le 8 nov. 2018

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