« La France se couche. La France se meurt. », Éric Zemmour, Le suicide Français, 2014, Editions Albin Michel
On pourrait faire une analogie avec cette phrase d'Éric Zemmour qui résumerait parfaitement l'essai d'Aude Lancelin :
La presse se couche, la presse se meurt.
En effet le Monde libre ne l'est en fin de compte pas vraiment libre.
Assujetti lui, au monde de l'argent, de la finance, des télécoms, assujetti oui à une puissance capitaliste et financière outrepassant l'indépendance de la presse dont est le symbole Xavier Niel : surnommé ogre des télécoms...
Tout au long de cet essai Aude Lancelin nous invite à découvrir la fin du monde des idées et le triomphe de la doxa libérale partout sur son passage.
Francis Fukuyama avait-il bien raison ? Après la chute du mur de Berlin, de l'URSS, des démocraties populaires communistes c'est vraiment la fin de l'histoire?
L'idéologie anglo-saxonne triomphe, c'est terminé rentrez chez vous il n'y a plus rien à voir?
En fin de compte peut-être que oui, peut-être que les idées socialistes ne pourront jamais plus retrouver leur essence, ou du moins elles se diront incarné par des hommes qui pratiquent un socialisme édulcoré : le social libéralisme.
Un socialisme artificiel oui, factice, qui renie les vraies idées de la gauche, qui se plie à la désindustrialisation, aux lois du marché, à la dérégulation financière, au désossage du service public à l'encontre de la privatisation massive de biens étatiques...
Le Parti Socialiste, héritier désigné de la SFIO de Jaurès, fondateur de l’Huma, oublie pour ainsi dire ce qui l'a tant porté depuis près de 200 ans : les révoltes populaires, la remise en cause du sort des travailleurs, les luttes menées qui la symbolisent tant pour permettre enfin une réelle justice sociale dans notre pays.
Et non cette gauche se couche, elle se couche aux pieds des puissants du monde de l'argent, au culte néolibéral...
En oubliant ainsi ses origines elle se droitise de plus en plus, tout en voyant partir une part de ses électeurs historiques vers le parti de la fille du Diable, car lui au moins semble les comprendre, les cajoler, ne point oublier les classes populaires, cette France périphérique qui se paupérise de plus en plus...
Cette longue route aux enfers de la gauche de gouvernement s'accompagne aussi de la chute de la presse qu'on a toujours voulu libre et indépendante face au patronat, au gouvernement, à quelconque corporation...
Et pourtant Aude Lancelin nous révèle une triste réalité tout au long de cet essai qu'elle démontre avec brio : le monde libre, celui des idées n'existe plus, il se meurt...
Il est saccagé, souillé par la doxa dominante qui doit être légion.
Toutes dérives, toutes Unes, toutes phrases critiquant les amis du journal, remettant en cause l'idéologie dominante, la hollandie, se voient alors censurées.
C'est alors un procès envers le journaliste qui a produit cela qui est exécuté.
On l'accable des heures durant, lui faisant craché le morceau : est-il un néo-marxiste, un frondeur, un intru de L'obsolète pour oser cela ?
On le menace aussi, de ne plus lui réserver sa rubrique qui lui est alloué, de le remettre à sa place plus bas que terre afin qu'il comprenne bien la leçon : la ligne à suivre il n'y en a qu'une et qu'une seule celle de l'Empire du politiquement correct : rien de plus, rien de moins...
Durant près de 15 ans Aude Lancelin a tenu et résisté dans ce milieu malgré son hérésie acharnée qu'elle compare dans le livre à celle de Winston au ministère de la pensée dans 1984 (Georges Orwell, 1948).
Cet hétérodoxisme se verra soldé par un licenciement sans plus attendre après 15 ans de bons et loyaux services
. Cette hérétique gênait de trop la hollandie, jugeant la couverture de Nuit Debout scandaleuse du Monde libre incarnée par elle-même et son conjoint Frédéric Lordon protagoniste du mouvement, critiquant sans cesse le gouvernement socialiste selon sa dire majesté.
Ainsi pour elle, Aude Lancelin, son licenciement signifie l'assujettissement de la presse nationale, des médias nationaux aux dominants, au monde de l'argent, lui-même à qui on sert le couvert à l'Élysée, qui est le symbole de défaite du monde des idées, du pluralisme intellectuel.
Elle rappelle pour autant que son licenciement n'a pas permis un regain de confiance des français envers leur Président, celui-ci d'ailleurs considéré comme le Président le plus impopulaire de la Vème République sera aussi le 1er de l'histoire à ne pas se présenter à sa propre réélection.
Le monde de l'argent et donc des médias ayant de toute façon déjà choisi le candidat du système : le petit prince de la finance Emmanuel Macron issu de la banque Rothschild, énarque et par ailleurs grand ami de l'ogre des télécoms, Xaxier Niel.
Cet essai est un livre éminemment politique, visant à faire comprendre au plus grand nombre la tartufferie lorsque nous parlons d’une presse libre et totalement indépendante en France.
Du moins soulignons que Aude Lancelin à l’intelligence de rappeler à la fin de son essai qu’elle n’inclut pas toute la presse et toute forme de journalisme qui subirait cette duperie en France : elle est subie en grande partie par toutes sortes de médias qui dépendent d’un groupe d’actionnaires riches et influents visant à étendre leur idéologie.
On voit ainsi ici toute la pertinence de cette fameuse remarque : la presse est le 4ème pouvoir.