Fiction, mais non Fictions
J'ai eu le bonheur autant que la malchance de découvrir Borges avec Fictions, son recueil de nouvelles le plus fantastique et ai depuis cherché (en vain) à retrouver le délicat frisson ressenti à la lecture de quelques uns de ses textes (La grande bibliothèque de Babel, La loterie à Babylone....). Le rapport de Brodie n'est malheureusement pas parvenu à me toucher de même.
Je reproduis ici un extrait d'une critique découpée il y a plusieurs mois dans une revue bon marché datée de l'époque de sa publication (1970) et qui préfigurait, à près de quarante ans d'intervalle, les impressions que je devais ressentir à la lecture de ces onze nouvelles.
« Jorge Luis Borges, le grand écrivain Argentin aveugle a deux publics distincts : celui des amoureux de sa poésie et celui des amateurs de ses nouvelles. Ces derniers ont tous étés conquis par Fictions, petit recueil de près de 20 nouvelles dont la plupart ont le pouvoir d'exercer durant leur lecture une étrange fascination et de laisser un souvenir à la fois imprécis et aigu. Près de 30 ans après la publication de ce bijou de la littérature fantastique, Borges renoue avec cette forme d'écriture, mais oublie la dimension imaginaire pour privilégier la simplicité du style et des histoires. Ces 150 pages se lisent de fait vite, facilement, mais n'éveillent en conséquence qu'un intérêt limité chez le lecteur en quête d'une nouvelle Bibliothèque de Babel ou d'un successeur à Funes. Tout au plus l'étrange humanisation des armes de La rencontre ou l'issue tragico-mystique de L'évangile selon Marc parviendront-ils à rappeler que l'auteur de ces eux ouvrages est un seul et même homme.
Asumelna, 5 décembre 1970»