Le Sermon sur la chute de Rome pourrait se résumer à un livre sur le le désir (vain ?) de l'Homme de créer le meilleur des mondes sans craindre de le voir disparaître à tout moment. L'auteur cherche à rapprocher cette volonté humaine avec les folles espérances d'empire éternel comme a pu l'être celui de Rome il y a bien longtemps.
L'Homme cherche le confort, dans le meilleur des mondes possibles, sans admettre la possible altération, voir l'écroulement de sa création. La notion de démiurge est ici bien représentée, avec les caractéristiques que cela comporte, les différences essentielles qui existent entre ce statut et celui de Dieu, le tout dans un récit moderne ; un récit auquel fait écho un fait historique fort lointain, un sermon de Saint Augustin datant de 410.

L'idée peut paraître étonnante, le début du livre déconcertant, mais petit à petit cela fait effet et l'on se rend compte de la pertinence de la réflexion de Jérôme Ferrari. Le changement est inévitable, tout ce que l'Homme accomplit et réalise n'est pas éternel, car seule la foi en Dieu l'est. Et cela nous est conté à travers l'histoire d'une famille de Corse, notamment celle d'un jeune homme ayant décidé de reprendre un bar sur cette île de Méditerranée au lieu de poursuivre ses études de Philosophie à Paris.

L'écriture mélange le brut de décoffrage de la vie moderne, avec son vocabulaire cru voir vulgaire, avec la douceur et la beauté linguistique des écrits chrétiens anciens. L'agencement est réussi, le fond rejoint la forme et le plaisir de lire s'en trouve plus intense.
On peut se désoler de la mélancolie omniprésente, du ton résolument triste et dépressif, voir fataliste par instant, qu'emploie le narrateur, mais cela reflète l'état d'esprit des personnages, cela démontre la cohérence du propos et fait parfaitement le lien avec le sermon prononcé par Saint Augustin des siècles auparavant, qui était lui-même adressé à des fidèles en pleurs, inconsolables devant la chute de leur monde.

L'auteur a qui plus est le bon goût de na pas se montrer péremptoire dans son discours, et admet l'hésitation, la tergiversation devant une thèse (ne pas se montrer étonné et triste devant la disparition d'une création humaine) sensée mais que l'on est en droit de juger encore perfectible.

Ce que fait l'Homme n'est-il réellement que du sable ? De la poussière s'échappant de ses mains et disparaissant au gré du vent ? Même la littérature et son objet même ne peuvent que difficilement apporter une réponse à de telles questions.
Mais l'essai est beau et loin d'être inutile...
ngc111
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le 30 août 2013

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