Si en ce début de mois de janvier, la majorité était définitivement "Charlie", j'étais quant à moi plutôt "Eric" (licenciement sans préavis du polémiste de la chaîne iTélé en fin décembre, rappelons-le). Alors que l'on défends becs et ongles la liberté de certains, on musèle celle des autres. Quoi de plus logique dans le pays des droits de l'homme ? Comme toujours, selon votre bord politique, vous n'êtes pas logés à la même enseigne... C'est pourquoi je me suis fait un devoir de lire le pavé d'Eric Zemmour jusqu'au bout (je ne suis pas trop fan d'histoire d'ordinaire) plutôt que le premier Charlie Hebdo "collector" post-attentat.
Force est de constater que l'essai se lit assez bien (à part peut-être certains passages sur le monde de l'entreprise et de l'économie qui m'ont moins parlé que d'autres. Après, cela dépend des affinités de chacun). Ce qui est surtout un très bon point, c'est que les chapitres sont courts, donc si celui que vous lisez vous ennuie un peu, vous savez que le suivant n'est pas loin. De plus, l'auteur alterne les thèmes à chaque nouveau chapitre (politique, économie, société, musique, sport, cinéma, séries, etc), ce qui rend la lecture d'autant plus plaisante qu'elle est variée.
D'emblée, les connaissances inépuisables du journaliste en matière d'histoire, de politique et d'économie, de l'après-guerre à 2007 en passant par l'inévitable mai 68 (le début de la fin, dirons certains), et jusqu'à toutes sortes d'anecdotes diverses et variées, force le respect. L'auteur sait de quoi il parle et on reste pendu à sa plume (en plus, son style d'écriture est fluide et agréable).
En parlant sans tabou des zones d'ombre et autres basses manœuvres des mouvements antiracistes, féministes et homosexuels, entre autres réjouissances, Zemmour se rend coupable de tous les délits d'opinion possibles et inimaginables. Quand les donneurs de leçons autoproclamés et intouchables en prennent pour leur grade, cela ne peut-être que très rafraîchissant. Le monde du sport, principalement du football, en prend aussi un sale coup, car il est vrai qu'entre les multiples histoires (à tiroirs) de corruption et de gros sous, il n'y a plus de beauté dans le sport depuis belle lurette...
Les plus cinéphiles d'entre nous apprécieront l'évocation de nombreux films et séries qui ont marqué toutes ces années de "joyeuse" déconstruction, comme la sitcom connue de tous Hélène et les garçons (qui prend ici une toute autre dimension, politique bien sûr). Mais ce sont surtout les références musicales qui sont les plus nombreuses, avec des analyses de chansons dont les thèmes abordés faisait très souvent l'écho des bouleversements sociétaux du moment. Si l'on en croit l'auteur, tout n'est finalement que propagande dans l'industrie du divertissement... Il n'a malheureusement pas tort.
L'état des lieux final est édifiant. Après avoir été dénaturée à force d'assimilationnisme, défigurée au canif par un libéralisme jusqu'au-boutiste et violée au fer rouge par le mondialisme, la France s'est tellement tirée de balles dans les pieds que tout l'édifice est prêt à s'écrouler à cause de ses bases fragilisées. Notre passé Chrétien et notre histoire si riche sont bafoués, ne reste plus que le culte de la repentance envers le colonialisme et la collaboration, avec cette culture excessive de l'excuse qui en découle. On substitue au sentiment de fierté, celui de l'éternel culpabilité. La haine de soi est donc totale, tout comme celle du père et de la famille traditionnelle, qui est plus que jamais d'actualité.
Mes quelques déceptions proviennent du fait que l'auteur n'évoque quasiment jamais la franc-maçonnerie, qui est pourtant rien que moins que la société secrète à l'origine de tous les grands bouleversements sociétaux de notre siècle (depuis la Révolution), en tirant malicieusement les ficelles dans l'ombre. Quant aux lobbies sionistes, qui sont aussi aux commandes depuis longtemps, leur influence est ici grandement diminuée. Quitte à secouer le cocotier, autant le faire jusqu'au bout...
Finalement, ces heures de solitude passées en compagnie du Suicide français n'était pas une perte de temps. Ma connaissance de mon pays (du monde aussi) et de son histoire s'en est trouvée grandie, en plus d'avoir appris pleins d'autres choses (notamment sur les raisons d'êtres et la philosophie du bobo) et pas mal d'anecdotes intéressantes. De plus, l'auteur m'a définitivement rallié à ses fans avec sa description très juste de la "troisième jeunesse" (pages 499-500), celle qui souffre en silence car elle ne possède ni les ressources financières des classes aisées pour s'en sortir, ni les aides dont bénéficient les classes plus pauvres, et qui n'a pas assez ou trop de diplômes, c'est selon... Bref, cette jeunesse de la classe moyenne inférieure qui se sent abandonnée par l'État et les partis politiques aux commandes, tout en se désolant d'être traité de fasciste et de réactionnaire par l'intelligentsia dès qu'elle se tourne (très logiquement) vers les extrêmes. Je me suis totalement reconnu.
Il faudrait plus d'un Eric Zemmour pour réveiller complètement les français de leur léthargie, mais un c'est déjà pas mal. La prise de conscience ne fait que commencer, n'en déplaise à ses détracteurs enragés, les gardiens autoproclamés du temple de la bien-pensance. En attendant, un grand merci à ce petit bonhomme courageux de risquer sa vie (il reçoit des menaces de mort chaque semaine et est condamné à se coltiner des gardes du corps jusqu'à la fin de ses jours) pour dire tout haut des vérités qui dérangent. Son abnégation de sa liberté de déplacement, entre autres sacrifices, ne peut que forcer l'admiration.