Il y a une blague juive qui raconte l'histoire de deux ashkénazes à Varsovie : l'un lit le journal du ghetto, et l'autre lit le journal Polonais. Le premier s'exclame "Oï oï oï les pogroms, les persécutions, comme le monde va mal pour les juifs! Pourquoi donc lis-tu le journal polonais?" L'autre répond : "regarde, d'après eux, on est riche, on est puissant, et on contrôle l'Europe entière!"
En tant que femme, j'ai un peu lu ce livre dans cet optique, pour m'enthousiasmer du pouvoir du "matriarcat". Je n'étais pas déçue.


Eric Zemmour a un style très elliptique, très allusif. Quand il fait référence à un évènement, il ne parle pas des faits et passe tout de suite à son explication et ses analyses. Ces allusions sont souvent très mal tournées (par l'usage extensif des parenthèses pour laisser trainer des noms d'hommes illustres) : par exemple "le droit d'auteur, une invention française (Baumarchais)". Pourquoi laisser trainer son nom si c'est pour le mettre dans des parenthèses. Très pédant, à mon avis.


Ensuite, Zemmour se met sous le patronage de Michelet, en essayant de recréer ses fresques imagées et téléologiques sur la France. Or il a gardé son style de chroniqueur, avec des phrases courtes et percutantes, certes, mais qui manquent d'ampleur et qui se répètent, encore et encore. Bref, c'est aguicheur, et dévoilent la vacuité de la pensée derrière.


Un exemple est assez révélateur. Quand Zemmour parle de l'affaire du watergate, il ne mentionne pas un instant les micros, le fait que Nixon a écouté ses opposants politiques, et passent tout de suite à son analyse implacable : l'affaire du Watergate est une revanche de l'alliance bien pensante américaine des juges et des journalistes pour renverser un bon président pour son machisme et son tempérament de Red Neck. Et ensuite il accuse tout un tas de gens de réécrire l'histoire : c'est l'hôpital qui se moque de la charité.


Zemmour accuse aussi les médias et la société française de faire des corrélations dangereuses, notamment entre la shoah et l'immigration : on ne peut plus critiquer la politique d'immigration ou sinon on est comparé à un nazi. Mais lui-même fait au cours de son livre énormément (mais vraiment BEAUCOUP) de comparaison fallacieuse. Il compare l'apparition des hypermarché Leclerc à la dékoulakisation. La perte d'emploi d'un côté, et 30 000 fusillés, plus de 2 millions déportés. L'hôpital et la charité, à nouveau, etc.


Puis il s'en prend à certains historiens, en particulier Paxton pour avoir détruit l'honneur français, qui a quand même eu plus de rigueur dans dix pages que Eric Zemmour en une centaine de pages...


Je vais m'arrêter là, mais disons que ceux qui aiment ce livre y ont trouvé ce qu'ils y voulaient.

borychanski
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le 16 nov. 2014

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