Le Tartuffe
7.1
Le Tartuffe

livre de Molière (1669)

Un classique de la littérature qui m'a étonné autant en bien qu'en mal. Je l'ai relu par obligation, mais je me suis surpris à aimer toute l'intrigue, pour finalement être assez déçu du dénouement. Je ne dévoilerai cette fin qu'à la dernière partie de ma critique, aussi celles et ceux qui ne veulent pas se faire spoiler dans tous les sens pourront se cantonner à la zone réservée aux âmes pures et innocentes. Faites cependant attention à ne pas y croiser Tartuffe : vous pourriez y laisser quelques plumes...


I-Aux royaume des pigeons, les hypocrites sont rois


Tout commence avec Orgon, un gentilhomme vraiment, mais alors vraiment très gentil. Hélas, le mot 'gentil' n'est pas ici à prendre comme une marque de bonté... en clair, cet homme est pétrit de valeurs traditionnelles pour son époque, telle que la foi, l'obéissance due au maître de maison et la générosité chrétienne. Et comme il souhaite trop bien faire, il va non seulement se mettre à confondre bien et apparence du bien, mais en plus se transformer en tyran en entraînant tout le monde dans sa bêtise.


Car il est le seul dupe de la pièce : lorsqu'il recueille Tartuffe et l’accueille sous son toit, il n'y a que lui pour ne pas remarquer ce que cet homme a de vulgaire, de profondément laid, qu'il profite autant que possible avant que la source ne tarisse. Tartuffe est en effet un très mauvais menteur, si l'on en croit Orgon lorsqu'il dit qu'il l'a recueillit en loques sur la place de l'église. Cela devait faire très longtemps qu'il n'avait pas été suffisamment convainquant pour abuser quelqu'un : la pièce qui porte son nom est donc moins le fait de son hypocrisie que de la profonde imbécilité d'Orgon.


Bref, Tartuffe émet une contrefaçon grossière du dévot qu'Orgon avale tout rond, alors il s'installe en authentique parasite, allant même jusqu'à faire la cour à la dame de son bienfaiteur. Évidemment, la pièce entière est une critique acerbe de ceux qui, à la cour, se faisaient profession de foi, mais pas que. Car si Orgon est un imbécile, il appartient à la plus dangereuse catégorie de tous : les imbéciles qui ont les pleins pouvoirs. Ce qui nous mène à...


II-Pourquoi j'ai mangé mon père


La vraie critique est là: sur le statut de ce père impitoyable qui veut imposer son caprice à tout le monde. Car la pièce commence lorsque tous s'accordent à dire qu'il est temps que Tartuffe s'en aille...et que le père veut le marier à sa fille, au détriment de son précédent fiancé. Tous font pression, tous tentent le tout pour le tout, mais plus on tente de convaincre et plus Orgon estime qu'on se révolte contre son pouvoir et durcit le ton. A ce stade, la pièce est proche d'Othello, avec un mari/père qui va droit à sa propre perte et que personne ne peut convaincre de s'en détourner. Un Othello en plus drôle, car les coups de théâtre donnent lieu à des comiques de situation à n'en plus finir. J'ai vraiment rit en lisant le Tartuffe, et l'écriture très travaillée augmente le plaisir (quoiqu'elle soit parfois difficile a aborder).


En fin de compte, on en vient presque à souhaiter que cet imbécile borné se fasse en...tuber comme il faut, juste pour lui apprendre. Et c'est ce qui va arriver, je vous assure. De même que ma déception.


III-La fin


Tartuffe a finit par aller si avant dans la confiance accordée par Orgon qu'il lui a soutiré des informations compromettantes, la preuve de sa complicité dans un crime d'état. Il lui a également fait signer une donation de tous ses biens, et lorsqu'à la faveur d'une mascarade, Orgon se rend compte de ce qu'est Tartuffe, il est déjà trop tard. Celui-ci se précipite en justice pour chasser le gentilhomme de chez lui, lui confisquer ses biens et le jeter en prison.


Lors des dernières scènes, le rythme accélère ainsi considérablement. On se doute que tout cela va mal finir, ou du moins qu'à l'instar du corbeau de la fable, Orgon jurera, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. Et là...


DEUS EX MACHINA!!!!!!!!


Le roi a tout vu, tout deviné et sauve l'affaire. Anéantissant toute morale possible à la pièce, qui aurait eue une portée infiniment plus grande si Tartuffe avait triomphé d'une façon ou d'une autre. C'est la raison de ce sept : à mon sens, puisque la pièce s'attaque à un parti qui avait à la cour une puissance infinie, Molière n'a tout simplement pas osé aller jusqu'au bout. Il est allé chercher son tout-puissant protecteur, ruinant toute la critique du patriarcat, puisque c'est un autre 'père' qu'il invoque pour le défendre. Freud aurait adoré cette pièce.


IV-conclusion


Une bonne pièce pleine de bonnes idées, probablement l'une des plus complexes et des plus abouties de Molière. La fin en a déçu plus d'un, dont moi, mais elle reste excellente pour qui fait l'effort de se familiariser avec son français sophistiqué. Alors par pitié, lisez et relisez-là, mais surtout, jouez- là!

Pulsar
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le 5 oct. 2016

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