Suite directe de la Trilogie des chroniques, Le temps des jumeaux est le premier volume d'une nouvelle saga qui place au premier plan le doré fragile à capuche et son guerrier de frangin aussi nunuche que massif. Les trois bouquins qui la composent sont toujours écrits par Margaret Weis et Tracy Hickman, ces deux passionnés de Donjons et Dragons qui ne tarderont pas à devenir de véritables stakhanovistes littéraires vu le nombre de suites, spin-off et autres épisodes intermédiaires qu'ils vont nous pondre par la suite (La guerre des Âmes, Les chroniques perdues...).
I: Ou l'on pose les bases de l'intrigue
Deux ans après avoir botté le cul fourchu de la reine des ténèbres, Tanis et sa bande de joyeux drilles (ou du moins ceux qui sont encore en vie) sont désormais des héros et le monde de Krynn a retrouvé une paix qui ne devrait jamais cesser... jusqu'à la prochaine guerre. Car oui, si la reine des ténèbres a effectivement été chassée de la surface du globe, ses armées de dragons, draconiens (bipèdes à tête de lézard) et autres créatures vouées au mal et la destruction sont toujours présentes, elles se sont juste repliée et peuvent donc à tout moment refoutre sur la gueule du monde libre. Bravo, ça c'est de la paix sûre les gars.
Et devinez quoi? C'est ce qui va finir par arriver!
Oh la la, c'est inattendu ça!
Kitiara, ex de Tanis, chef des vestiges des forces du mal, et accessoirement véritable machine à tocs ambulante (vu comme les narrateurs la font abuser de son "sourire en coin" à longueur de livres) vient en cachette retrouver notre brave Raistlin, devenu maitre d'une tour de sorcellerie dressée en plein cœur de la capitale des "gentils". Sachant son frère devenu particulièrement puissant, elle lui propose de se joindre à lui et de... conquérir le monde! Oui, Minus!
Raistlin, entre deux toussotements, lui rit au nez et l'envoie paitre en lui disant que ses plans c'est bien gentil mais qu'il a beaucoup mieux en tête. Il lui révèle alors qu'il ambitionne de devenir... roulement de tambour... Un dieu. Il compte détruire la Reine des Ténèbres et prendre sa place. Et sans transpirer.
Pour se faire, il aura besoin d'une personne en particulier, à savoir une prêtresse de Paladine, qui représente le côté clair de la force: l'alliance des ténèbres et de la lumière, tout ça, tout ça...
Kitiara ne laisse rien paraitre et sans va, pensant que son frère ne doit pas rajouter que de la tisane dans son eau chaude.
Du côté de leur guerrier de frangin, l’ambiance n’est pas la même. Le cadre a beau être plus charmant (Solace en mode hippie avec ses maisons dans les arbres…), c’est bien la seule chose de gaie: Caramon, anéanti par l'absence de son jumeau est devenu une ruine obèse et alcoolique. Son ménage avec Tika bat de l'aile et vu que la guerre est finie, son rôle de guerrier n'a plus aucune utilité, lui laissant bien trop de temps pour ressasser sans cesse de vieux souvenirs.
La déchéance de ce personnage simplet mais également bon et attachant traduit bien l’idée que, selon moi, Weis et Hickman sont enfin passés au niveau supérieur : déjà exit Tanis, le demi-elfe barbu que je n’ai jamais pu blairer. Il se contentera d’un rôle secondaire, voir tertiaire. Le choix de mettre en avant les deux jumeaux qui ont la relation la plus complexe et la plus intéressante à suivre (toute proportion gardée j’entends) est une excellente nouvelle. Tout comme donner un développement inattendu au personnage de Caramon qui gagne en profondeur, en complexité et a donc moins à rougir de la comparaison avec Raistlin, clairement le chouchou des deux auteurs.
La encore, je ne vais pas plus développer l'intrigue: la seule chose à savoir c'est que Caramon va être informé que son frère est devenu totalement maléfique et que lui seul a donc le pouvoir de sauver une âme. Accompagné de Crysania, prêtresse de Paladine tombée sous le charme de Raistlin (le pouvoir rend beau) et d'un autre personnage (que je vais développer juste après), il va se lancer dans une quête désespérée pour sauver son frère et se sauver lui-même. En espérant qu'il n'agisse justement pas selon les plans de Raistlin....
L'info du jour. Qui est Paladine? L'opposé total de la Reine des Ténèbres. Son avatar est un gigantesque dragon argenté mais on ne sait pourquoi, son kiff est de déambuler sous l'apparence d'un vieux magicien totalement à l'Ouest qui perd sans arrêt son chapeau! D'accord.
II: Le cas Racle-Pieds
Ce personnage étant de tous les romans DragonLance, il est temps de lui consacrer un petit paragraphe. Tass. Tass Racle-Pieds. Tasslehoff Racle-Pieds. Une créature de petite taille coiffé d'un catogan dont la race se nomme Kender. Loin d'être une surprise, celui-ci à la (sale) habitude de se voir sans cesse mis en avant par ses auteurs qui pensent naïvement que Tass est drôle et attachant. D'accord il l'est à l'occasion. A l'occasion. La plupart du temps, il se montre bien plus souvent attachiant qu'autre chose! Cleptomane, toujours en train de plaisanter et de faire des commentaires dans les pires situations possibles, il em*****... tout autant ses compagnons que le lecteur et j'ai toujours été ébahi qu'il en ai jamais ramassé une. Va-t'il lui aussi bénéficier de la qualité supérieure d'écriture dont jouit cette nouvelle trilogie? L'avenir nous le dira.
III: Observations
Je le répète mais Le temps des jumeaux est le livre de la maturité. Ou plutôt celui qui l'annonce. Enfin dépêtrés d'une première intrigue plate et d'une compagnie de baltringues trop inspirés par Le Seigneur des Anneaux en moins bien, Weis et Hickman commencent à ôter ce sourire condescendant qui ornait ma bouche à chaque lecture. J'avais du plaisir à les lire, évidement, mais je n'avais pas le courage de repartir pour une deuxième fournée de Chroniques! Heureusement, en un seul tome, mes craintes ont pour la plupart disparu: les personnages sont plus intéressants, le suspens fait enfin son apparition et le tout s'annonce bien plus dramatique encore que dans la saga précédente. Oh, il y a toujours des clichés, quelques passages ennuyeux et de l'abus de bons sentiments à la pelle comme avec
le retour de Bupu
et des personnages totalement opposés à leur description, à l'instar de Chrynasia qui se comporte plus comme une peta*** arrogante que comme une douce prêtresse pleine de bonté.
Le tout ne pèse cependant pas lourd dans la balance, c'est l'essentiel. Allez, que la suite soit à la hauteur, et, soyons fous, même encore meilleure!