A lire absolument, pour la réflection que suscite le thème principal abordé.

L'histoire en elle-même, c'est-à-dire la permière moitié du livre (lue en une semaine), apparaît plutôt banale, avec une histoire d'amour pas trop mal racontée mais un peu grandiloquante. Cela a au moins le mérite de mettre en contexte la deuxième moitié (lue en une nuit), c'est-à-dire le procès et les discussions s'en suivant, fascinantes par l'ascerbité de la critique et l'importance de cette question à laquelle personne n'a jamais vraiment répondu: que sommes-nous au juste?

Je trouve en revanche paradoxal que les personnages du livre se prononcent sans arrêt contre le racisme (c'est en un sens l'objet de l'intrigue), mais que les mêmes personnes répètent à tort et à travers que l'"Homme Blanc" est plus évolué que les "Négritos".

J'éprouve également une forme d'horreur mêlé à du mépris, à moins que ce ne soit simplement de l'amusement, vis-à-vis des considérations religieuses sur lesquelles certains protagonistes se cassent la tête: "bon sang! si les tropis sont humains, ils vivent dans le péché et l'ignorance du christ, je dois les baptiser si je ne veux pas qu'ils finissent dans les limbes! mais si ils sont animaux, les baptiser serait un acte impie! je n'en dors plus!" ou encore "l'espèce humaine se définit par sa foi en Dieu" (je suis athée, donc un animal... cool!), voire même "l'espèce humaine se détache du règne animal en ce qu'elle est choisie par Dieu", etc.
Je ne connais pas les convictions religieuses de l'auteur, mais si celui-ci a voulu à travers certaines bouches critiquer la foi en dieux et la ridicule autoflagellation provenant de la vision chrétienne de l'humanité (péché originel), il n'aurait pas fait mieux!

Sur le même plan, on peut mettre toutes les considérations liées à l'âme: quelles espèces sont douées d'âme (donc peuvent être sauvées par le christ) et lesquelles ne le sont pas? A quoi le reconnaît-on? A noter également le rejet comme "progagande bolchevique" l'idée que la spécificité de l'intelligence humaine ne provienne que d'une différence de taille du cerveau.
Trouvant l'idée d'âme criante d'absurdité, ces discussions me font évidemment sourire, matérialiste que je suis...

Ensuite, bien que cela aurait été éluder la question principale (nature humaine), j'aurais proposé pour les tropis une autre solution: qu'ils ne soient ni "humains", ni "animaux". Si nous sommes si prompts à nous séparer du règne animal à cause de notre spécificité, pourquoi ne pas accorder un statut similaire à une autre espèce qui aurait accompli un pas vers la conscience de soi, avec tout le respect qui va avec (refus de l'esclavage, etc.)? D'ailleurs, que ferons-nous si nous rencontrons une race extra-terrestre intelligente, mais moins évoluée que nous technologiquement? La réduirons-nous en esclavage sous le simple prétexte qu'elle n'est manifestement pas "humaine"?
A ce sujet, je trouve d'ailleurs cocasse (mais triste) que les protagonistes se préoccupent tant que les tropis ne soient utilisés comme main d'oeuvre, alors que c'est une pratique courante entre les humains, encore aujourd'hui (cf. les centaines de milliers de chinois qui fabriquent nos vêtements. ou d'ailleurs les africains affamés à cause de notre politique. au choix).

Pour finir, la lecture de ce livre résonne étrangement après la lecture de celui-ci: http://www.senscritique.com/livre/L_ecologie_en_bas_de_chez_moi/365683
où l'auteur critique l'idéologie écologiste, pour résumer: beaucoup de gens considèrent l'état de nature comme meilleur, ils seraient prêts à sacrifier une symphonie ou la relativité générale si cela pouvait sauver quelques pandas. Nous ne sommes plus "nature"! (clin d'oeil aux pourceaux militant pour "l'union naturelle d'une femme et d'un homme). Cessons d'appeler le monde "la Nature", en parlant d'elle comme d'une dame sage et bienveillante.
Allez vivre un mois dans une forêt, sans commodités... Vous verrez de quoi je parle.
Bornerdogge
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le 9 août 2013

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Bornerdogge

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