Même si c'est un peu triste, c'est toujours plus intéressant d'essayer de comprendre pourquoi on n'a pas aimé le roman d'un·e écrivain·e qui nous plait, plutôt que celui d'un·e inconnu·e qu'on vient de découvrir et qu'on ne recroisera plus. Déplaire c'est une chose, mais décevoir, ah décevoir...
Or donc, les trois romans précédents de Message m'ont beaucoup frappé. Il est parfois maladroit, parfois un peu candide, mais il y a dans son écriture une sincérité qui me touche et une façon de s'emparer de sujets contemporains toujours imaginative, sensible, nuancée. Cette fois, on dirait justement que conscient de tenir LE thème le plus actuel qui soit, il s'est frotté les mains en se disant : la pandémie, c'est ma cible idéale, trop bien, allons y. Cata.
Parce que d'un coup, délaissant l'écriture du « nous » (comme il la nomme dans son essai sur les romanciers pluralistes) il lorgne du coté de l'écriture du "je", et se plante dans les grandes largeurs. Je crois que le principal problème, c'est que la gageure était absurde : traiter la pandémie sous l'angle personnel ne peut marcher qu'en extrêmement décalé (cf les chroniques de Chevillard dans un célèbres quotidien du soir), car sur un plan « naturaliste », c'est bon, on a tous donné, pas besoin d'avoir le point de vue de machin, de truc ou de bidule (manque plus qu'Angot ou Mauvigner nous racontant comment s'est passé leur confinement, et la cour sera pleine). De là découle malheureusement l'écueil principal du livre à mes yeux : non seulement c'est inutile et ça manque totalement d'enjeu, mais en plus, à force de chercher quelque chose à dire sur tout ça, le livre devient niais. Franchement, la piste abandonnée au bout de 30 pages m'était bien plus alléchante (oui je sais c'est pas français, mais ça me plait) : le présent comme simple prétexte pour rebondir sur autre chose, un ailleurs dans l'espace ou le temps, l'histoire de la Peste de Justinien plutôt que notre pauvre covid tout pourri.
Alors sans doute, en dernière analyse, pourrait-on se dire que c'est un roman pour dans 30, 50 ou 80 ans. Un témoignage à garder au congélateur, pour ceux qui n'auront pas vécu le bouzin. Ouais, mais bon vu l'état de la planète et la mentalité de la plupart de ses habitant·e·s, ça me parait un peu risqué comme pari, mon cher Vincent.