La plupart des médias et l'ensemble de la classe politique en ayant fait des tartines au sujet des "casseurs" qui se sont manifestés dans les nombreux mouvement sociaux qui ont agité la France ces derniers temps, il m'a semblé salutaire de pouvoir entendre un autre son de cloche, je veux dire au-delà de l'unanimité exprimée par les premiers cités. D'où l'acquisition, un peu par hasard, de ce bouquin, dont l'auteur est un universitaire canadien en sciences politiques.
Universitaire ne veut pas dire écrivain : le style du bouquin est plat, monotone. La syntaxe simple. Celui qui y chercherait de l'inspiration en matière de romantisme révolutionnaire en sera pour ses frais. Pour être parfaitement honnête, j'ai même trouvé ce bouquin plutôt chiant à lire. Mais il est en même temps très factuel, l'auteur rapportant, les uns après les autres, de nombreux faits et témoignages, à propos d'événements intervenus lors de manifestations au sein desquelles des black blocs s'étaient formés. Nombre d'entre eux concernent d'ailleurs des situations qui se sont produites en Amérique du Nord, et dont j'ignorais à peu près complétement l'existence, celles-ci n'ayant guère été couvertes par les médias européens. En l'espèce, ce manque de références ne m'a pas facilité la lecture; à côté de cela, j'ai pu prendre conscience que le phénomène n'était pas cantonné à la seule Europe...
La contrepartie, dans le bouquin, d'une écriture peu engageante est la structuration de l'ouvrage. Il est structuré en cinq chapitres abordant chacun une thématique précise. En l'occurrence : l'historique, la violence politique, les raisons de la révolte (entre émotion et réflexion politique), les critiques (de diverses natures) adressées au black bloc et enfin, la répression étatique et policière. Comme je le disais plus haut, tout ça est très bien documenté (avec près de soixante pages de notes et de références bibliographiques). Sacré boulot, tout de même.
Néanmoins, il manque peut-être tout de même une synthèse : à trop prendre connaissance, en enfilade, de faits et de témoignages, le lecteur peine à dégager une vision d'ensemble. La conclusion aurait pu remédier à cela : hélas, celle-ci est très courte et l'auteur s'y lâche un peu en dévoilant assez clairement ses sympathies. Cette conclusion m'a tout de même confirmé que mon objectif initial, c'est à dire avoir sur le sujet un autre son de cloche que celui des médias et des politiciens, était atteint.
Et qu'en ai-je retenu, en définitive. Eh bien, que les blacks blocs ne sont pas un mouvement politique au sens propre du terme, mais plutôt une technique de manifestation. Que leurs membres sont - politiquement parlant - de sensibilité anarchiste (au sens notamment où ils récusent toute forme d'autorité, et, donc, les chefs et toute forme de représentants). Que les activistes sont fortement divisés, entre partisans d'actions qui bannissent toute forme de violence et blacks blocs. Et que la violence de ces derniers reste en règle générale très ciblée sur des symboles (biens matériels appartenant à des entreprises privées, souvent multinationales et généralement bien assurées). C'est presque à se demander pourquoi ils font si peur aux régimes en place, à moins que ces derniers ne les instrumentalisent pour justifier leur autoritarisme et de nouvelles mesures de restriction des libertés individuelles...