Normal, anormal, paranormal ? Un livre sur nos choix de vie, sur la mort, sur les relations avec les disparus, sur l'héritage génétique, sur les rapports humains. Bien sûr, c'est casse-gueule, et on ne pourra dénier à Frédérique Deghelt dans Les brumes de l'apparence, le courage de pousser loin sa réflexion avec le risque de braquer les incrédules. Sans doute le basculement est-il trop radical concernant son héroïne, femme hyper-active à la limite de la caricature, parisienne et débordée, vendeuse de vent et d'éphémère. Et que dire de son mari, autre archétype ? Il y a dans le livre un manichéisme un brin sournois car la romancière a beau insister sur les doutes de son personnage principal, sa résistance au changement et à l'inconnu, elle a clairement choisi son camp. Le lecteur réagira avec sa propre sensibilité et ses convictions. Les scènes paranormales sont impressionnantes à moins qu'on ne les trouve grotesques. Question de perspective. Frédérique Deghelt milite pour que nous changions notre regard au monde et aux autres, vers une authenticité qui s'est perdue dans l'urgence de la société moderne et "performante" où tout va trop vite, dans la superficialité absolue. C'est quand elle se fait moraliste que le bât blesse, la démonstration manque alors de subtilité. Etait-il besoin de faire s'affronter frontalement des univers aussi différents : ville vs campagne, bien contre mal avec de "vraies" valeurs à retrouver ? Le style est alerte, très agréable. Le livre est comme notre rapport à la religion : on y adhérera, on y croira, ou pas. Ou l'on restera sceptique. Ceci dit, Frédérique Deghelt pose de bonnes questions, même avec de gros sabots. On n'est pas obligé de souscrire totalement à ses réponses.