«  Enfant, ne passe pas sans m'avoir aimé. Je suis encore belle, dans la nuit ; tu verras combien mon automne est plus chaud que le printemps d'un autre. »


Bilitis petit corps aux infinies délices.
Genèse et mort où l'érotisme commence ; dans les premiers pas de l'enfance d'abord, la boue qui se plonge sur la peau, le corps qui se frotte aux mondes, aux parfums des fleurs, aux chaudes pluies de l'été, les herbes que nous ne goûteront plus.
Car on a beau dire, s'acharner et creuser encore et encore, la nostalgie d'un plaisir n'est jamais le plaisir même, la toute première des sensations fuit avec le passé auquel elle appartient.
Bilitis tu dévoiles par ton corps ton âme toute entière, comme le cœur d'un fruit.
Les langues qui s'unirent, les yeux en délire à d'autres iris pleines et dans le lait des chairs, dans la douceur des sexes, la paix qui seul n'est pas une victoire pour les amants.
Ressers-toi encore et nous formerons un monde à tant d'extrémités.
Viens encore, viens, mon don est un don sans fin, mon désir inaltérable, viens, étranger, chère sœur ou barbare, au creux de mes reins il existe le mystère de l'existence.
Je ne te tromperai pas ; je ne connais pas le fard des fades mensongères.
Je rallume les nuits que d'autres ont voulu tuer et je ne m'abandonne pas comme le fat dans son gâteux plaisir, pour des bêtises enfouies.
Ma joie c'est ce que j'ai, mon corps et mon âme, et je les donnerai jusqu'à l'épuisement.
Le temps aussi sur moi est tombé, l'hypocrite mascarade. Ni les folies d'antan ni les courbes parfaites. Tout s'achève si bien, fatalement.
Mais ne pleure pas, rejette l'ombre à son tombeau car j'ai connu tous les corps et dans eux je ne cesse de vivre. Car j'ai vu les terres plus profondes que la mort et plus forte que l'oubli.
Dans la tombe même, là où certains s'y couchent, je frisonne comme au premier jour.

machinalaver
9
Écrit par

Créée

le 31 janv. 2016

Critique lue 398 fois

3 j'aime

6 commentaires

machinalaver

Écrit par

Critique lue 398 fois

3
6

D'autres avis sur Les Chansons de Bilitis

Les Chansons de Bilitis
Gourgandine
10

Et le Verbe se fit Chair

« Si un couple amoureux se compose de deux femmes, il est parfait, S’il n’y en a qu’une seule, il est moitié moins bien, S’il n’y en a aucune, il est purement idiot. » Ainsi Pierre Louÿs...

le 28 sept. 2012

13 j'aime

2

Les Chansons de Bilitis
machinalaver
9

Les chansons de Bilitis

«  Enfant, ne passe pas sans m'avoir aimé. Je suis encore belle, dans la nuit ; tu verras combien mon automne est plus chaud que le printemps d'un autre. » Bilitis petit corps aux...

le 31 janv. 2016

3 j'aime

6

Les Chansons de Bilitis
Dionysia
9

Critique de Les Chansons de Bilitis par Dionysia

La sensualité de ces textes a su me transporter comme peu d'autres et même m'émouvoir. Des images sublimes, une musicalité qui m'a touchée, une atmosphère que l'on trouve aussi dans Aphrodite et que...

le 1 avr. 2012

3 j'aime

Du même critique

Les Coups
machinalaver
8

"Printemps, tout était bon, rien n'était pour moi"

On a beau dire, c'est toujours mieux quand on la connaît soi-même la souffrance et la faim pour en parler ; quelque chose en plus qui se dégage, du sang et de la sueur sans doute. Meckert il...

le 18 mars 2016

9 j'aime

7

Les Deux Étendards
machinalaver
9

"Si ces hommes valaient mieux que leur sort, ils l'auraient dompté."

« … 300 pages pour nous faire comprendre que Tutur encule Tatave c'est trop » C'est étonnant comme cette phrase de Céline s'applique merveilleusement bien au roman de Rebatet. Parce que oui...

le 9 mars 2016

8 j'aime

3

L'Enfant brûlé
machinalaver
8

Naissance

[ Ceci n'est pas une critique ni un extrait. ] Il naît, mais sans un bruit, dans le silence. Il naît, il veut crier, il veut crier la douleur qu'il n'a pas, l'incompréhension déjà. Car naître c'est...

le 23 avr. 2019

5 j'aime