J’ai toujours été intimidé par ce monument qu’est Victor Hugo. Autant pour son érudition que pour son talent presque inné pour l’écriture. Indépassé, indepassable. Ce thaumaturge bourru d’apparence, aura pour moi écrit les plus belles pages de la littérature française.
Les contemplations sont une friandise pour l’âme, une gourmandise de douceur, de « mignonnerie », de sensibilité. Agréable pour l’esprit, la plume d’Hugo, à la fois dure et légère, vous titille les sens et vous pique au coeur.
Les contemplations chantent le poète, l'amour, la nature, les moments fuguaces de vie… c’est aussi un receuil d’engagement ou Victor Hugo dénonce avec vigueur et à propos la condition humaine de son époque (condition de la femme, des enfants au travail…)
Ce recueil est enfin un exutoire pour notre auteur, particulièrement dans le mélancolique et plus sombre "Pauca meae", ou il aborde largement la disparition tragique et prématurée de sa fille en 1843.
Victor Hugo est de ces poètes : un grand poète.
"Il faut que le poète, épris d'ombre et d'azur,
Esprit doux et splendide, au rayonnement pur,
Qui marche devant tous, éclairant ceux qui doutent,
Chanteur mystérieux qu'en tressaillant écoutent
Les femmes, les songeurs, les sages, les amants,
Devienne formidable à de certains moments.
Parfois, lorsqu'on se met à rêver sur son livre,
Où tout berce, éblouit, calme, caresse, enivre,
Où l'âme à chaque pas trouve à faire son miel,
Où les coins les plus noirs ont des lueurs du ciel,
Au milieu de cette humble et haute poésie,
Dans cette paix sacrée où croît la fleur choisie,
Où l'on entend couler les sources et les pleurs,
Où les strophes, oiseaux peints de mille couleurs,
Volent chantant l'amour, l'espérance et la joie,
Il faut que par instants on frissonne, et qu'on voie
Tout à coup, sombre, grave et terrible au passant,
Un vers fauve sortir de l'ombre en rugissant !
Il faut que le poète aux semences fécondes
Soit comme ces forêts vertes, fraîches, profondes,
Pleines de chants, amour du vent et du rayon,
Charmantes, où soudain l'on rencontre un lion."