Claude Michelet, on le connait bien sûr pour ses très beaux romans de terroir (la saga des gens de Saint-Libéral) dont l'action se passe dans le Lot ou en Corrèze.
Mais là, c'est aussi un roman de terroir sauf qu'il se passe entre 830 et 865 alors que les héritiers de Charlemagne se déchirent l'Empire et que les Vikings (les Normands) font des incursions dévastatrices dans le territoire.
Déjà, c'est une période de l'Histoire plutôt obscure que peu de romans abordent. Ensuite, devant une certaine vacance du pouvoir central, des communautés se constituent pour construire ou reconstruire, pour aller de l'avant.
Ici, il s'agit d'une communauté de bénédictins qui s'installe dans les ruines d'une abbaye dans une région proche de la Loire. Le roman décrit les efforts colossaux déployés, sur le moyen terme, par ces moines pour défricher, drainer et assainir les marécages et, en même temps, reconstruire une abbatiale et une abbaye.
La contrée est hostile et la communauté doit utiliser divers subterfuges pour parvenir à s'imposer parmi une population de serfs et imposer une religion chrétienne.
Je ne sais pas si le roman a des bases historiques précises mais, peu importe, car l'histoire racontée est tout-à-fait crédible et a bien dû se produire ici ou là. Ce qui est surtout crédible est la confiance inébranlable de ces "bâtisseurs" dans un avenir qui peut toujours paraître incertain qui sans relâche, "vingt fois sur le métier remettent l'ouvrage". Quand ce n'est pas les fièvres des marais qui déciment la population, c'est l'arrivée de la variole. Quand ce n'est ni la variole ni les fièvres, ce sont les conditions climatiques ou encore les vikings mais l'énergie de la communauté est toujours positive afin de repartir de l'avant.
On reconnait bien l'exploitant agricole en Claude Michelet qui sait bien que l'agriculture est d'abord une affaire de travail, dur et ingrat, et ensuite une affaire de patience où l'espoir domine le découragement.