Les Dimanches de Jean Dézert partagent avec Vivre de Kurosawa, outre la similitude de leur personnages, deux fonctionnaires résignés qui refusent de manquer un jour de travail (même pour mourir), le même abandon face au quotidien, la même foi dans son insignifiance, dans la routine et ses aléas minuscules, et sur le seuil de la défaite, l’impossible oubli que l’on recherche au fond d’une bouteille ou dans la compagnie d’inconnus.
Mais là où la fracture, provoquée par la maladie chez le cinéaste, vient dévoiler le gouffre d’une vie que le héros s’empresse alors de combler, chez Jean de la Ville, si c’est l’amour, ou quelque chose qui lui ressemble, une sorte d’imprévu charmant qui provoque la rupture avec le quotidien, celui-ci imprègne tant le personnage qu’on ne peut les dissocier. Les dimanches commence par une définition, celle de Jean Dézert, un nom, un mot, un désert, une vie, vide. Même la mort est impuissante à le vider de sa substance, il appartient au néant, à la foule, anonyme. L’amour n’est qu’une tendre farce - le premier regard est le dernier - un incident capable de faire dévier la trajectoire la plus rectiligne, et pourtant si dérisoire lorsqu’on ne s’y jette que pour quitter une solitude qui ne pèse rien.
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le 7 nov. 2013

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