C'était en 1984, à la radio et dans les couloirs du lycée il n'y en avait que pour le prix Goncourt attribué à "L'amant" de Marguerite Duras, pris sans doute du désir paradoxale de faire comme tout le monde et de me singulariser, j'ai acheté dans une librairie qui n'était pas ma régulière ce bouquin en format poche qui sur sa couverture affichait prix Goncourt sans trop être conscient qu'il s'agissait de celui de l'année d'avant.
Pourquoi cette introduction personnelle ? Parce que ce roman assez étrange, où l'auteur multiplie les dédoublements, me semble illustrer mon rapport au monde.
Un homme souhaite écrire mais n'y parviens pas jusqu'au moment où il s'incarne dans un être de fiction qu'il invente. Puis quand arrive le moment d'offrir le livre au monde il s'associe à un autre qui à son tour incarne aux yeux de tous cet être qui n'existe pas.
Plus encore que la traversé des horreurs du second 20° siècle (l'action débute avant la seconde guerre mondiale) c'est le principe même de ce roman étrange qui m'a toujours fasciné.
Le désir d'un homme de créer et d'être reconnu et qui n'y parviens qu'en recourant à une imposture (il prend un pseudonyme) me renvois à mon propre sentiment d'imposture, le deuxième homme qui l'aide et qui devient l'auteur aux yeux du monde incarne un désir de briller... qui n'a pas rêver en grattant trois lignes sur un cahier de passer un jour prochain à Apostrophe ? (Pardon pour la référence ancienne mais j'en ais pas d'autres).
Association d'imposteurs qui tentent d'assouvir leurs désirs sans le risque d'être blesser par lui mais qui à la fin devront honnêtement se confronter à lui. L'auteur devra se révéler au monde et le propagateur se confronter à son sentiment de vacuité.
Finalement je n'ai pas lu Duras cette année là (ni pas la suite d'ailleurs) et ce livre qui m'a tellement absorbé n'a cesser d'agir comme un miroir même si l'avoir lu ne m'a pas permis de briller dans les couloir du lycée.