Comprenez ce que je dis : pendant la première heure du 15 août 1947 - entre minuit et 1 heure du matin - pas moins de mille et un enfants sont nés à l'intérieur des frontières de l'Etat souverain et nouveau-né de l'Inde. En soi, ce n'est pas un phénomène extraordinaire (encore que les résonances de ce chiffre soient étrangement littéraires) - à l'époque, dans notre partie du monde, les naissances excédaient les morts d'environ six cent quatre-vingt-sept à l'heure. Ce qui rendait l'évènement remarquable, c'était la nature de ces enfants, chacun d'eux étant, à cause de quelque caprice de la biologie, de quelque pouvoir surnaturel du moment, ou simplement d'une pure coïncidence (bien qu'une synchronisation sur une telle échelle aurait saisi d'étonnement C.G. Jung lui-même), doté de traits, de talents ou de facultés, qui ne peuvent être qualifiés que miraculeux. C'était comme si - si vous me permettez une petite fantaisie, dans ce qui sera, par ailleurs, je le promets, le récit le plus sobre dont je sois capable - comme si l'histoire arrivant à un maximum de signification et de promesse avait choisi de semer, en cet instant, les graines d'un avenir qui serait radicalement différent de tout ce que le monde avait connu jusqu'ici.