Daniel Cordier, résistant, secrétaire et biographe de Jean Moulin, marchand d'art ; anciennement militant à l'Action Française, antisémite ; mais, évidemment, comme nous le prouvent ces mémoires, grand amoureux.
Dans cette partie de ses mémoires qui précède Alias Caracalla (sa vie de résistant), l'auteur nous présente son adolescence dans un pensionnat religieux pour garçons où il découvre son amour et son désir pour ses camarades -- l'un d'eux, notamment, semble attirer ses yeux et son cœur : David Cohen. Partagé entre ses amours terrestres et sa dévotion à Dieu, le jeune Daniel Cordier est pris au piège : comment conjuguer sa conscience du péché et sa passion dévorante d'adolescent ?
Dans un style simple mais qui révèle sa tendresse, l'auteur décrit ces années tortueuses, pleines de questionnements et de doutes. S'ensuit une "seconde partie", composée, entre autres, d'extraits de son journal intime, dans laquelle il explique combien, même après la guerre, le souvenir de David ne l'a pas quitté. Il cherche à le retrouver, à discuter avec lui de ces instants suspendus où la vie entière peut se jouer et, pour Cordier, semble-t-il, où elle s'est jouée effectivement. On comprend à quel point le passé et la nostalgie ont joué un rôle dans sa vie d'homme. C'est une véritable écriture du temps qui passe et de l'influence de la nostalgie sur la vie de quelqu'un.
Je vous invite à lire ce livre, ne serait-ce que pour tenter de comprendre cet homme, pour y découvrir son style et ses souvenirs, avant, peut-être, de lire la suite de ses mémoires et son travail sur Jean Moulin.