"C'est grâce à vous que j'ai compris ce que signifiait Hiroshima."
Croulant sous les œuvres exposant le "devoir de mémoire" à l'encontre de la Shoah, on oublie trop souvent qu'il y eut un autre drame majeur durant cette guerre 39-45 : Hiroshima. Enfin non, on connait l’événement et on sait qu'il marque la fin totale du conflit, mais sait-on vraiment ce que signifiait Hiroshima pour le Japon ?
Roman bref et percutant, "Les fleurs d'Hiroshima" raconte l'histoire d'une famille pauvre japonaise qui va héberger un Américain en passage dans la fameuse ville nucléaire. Non conscient que sa simple présence (et sa nationalité surtout) rappellent trop de mauvais souvenirs aux locaux, celui-ci ne manquera pas de faire des réflexions impertinentes et choquantes. Et très longtemps, son hôte prendra sur elle, parce qu'un Japonais doit rester digne, ne doit pas montrer ses émotions (surtout à un étranger qui représente le bourreau de son peuple), et elle essayera de cacher les traumatismes liés à la bombe. Pour ne pas choquer son visiteur, pour ne pas le faire culpabiliser, mais aussi pour éviter qu'il voie dans quelle misère fut réduit ce peuple si fier.
C'est là l'une des plus grandes qualités de ce roman, il expose parfaitement les valeurs et traditions japonaises, et reste sobre dans ses descriptions des séquelles atroces des survivants. Et c'en est d'autant plus terrifiant, Hiroshima, ce n'est pas qu'une bombe, ce sont des centaines de milliers de destins brisés, qu'ils soient mort ou blessés/mutilés. Et les conséquences peuvent s'étaler sur plusieurs générations. Et c'est quand on prend conscience de tout cela, et qu'on se rend compte que c'est arrivé en plus à ce peuple si fier, qu'on comprend l'ampleur du traumatisme japonais. Leur sang est souillé pour l'éternité, ils ont du plier l'échine devant leurs bourreaux des années durant et garder pour eux leur haine, leur tristesse et leur malheur.
Et au cours du roman, le rapport de force s'inverse, et l'Américain finit par être gêné de sa propre présence, d'assister à une telle horreur, et d'être issu du pays qui l'a commis. Quand bien-même était-ce la guerre, en face c'était des centaines de milliers d'innocents aux destins simples, mais heureux. Impardonnable et à ne jamais oublier. Mais curieusement, les Américains préfèrent faire des films sur la Shoah que sur Hiroshima.
Un livre coup de poing, malgré ses quelques maladresses, qui permet d'en apprendre beaucoup sur les coutumes japonaises, et sur leur mentalité et leur perception des choses.
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