Hommage fébrile à la littérature Dont la beauté fragile a soigné mes blessures...
Des heures dans le noir à réciter ces textes,
Sans feindre de savoir que ce n'est qu'un prétexte
Sans cesse m'émouvoir des mots, de leur prouesse,
N'en pouvant refuser l'insidieuse caresse.
Qu'il est grand, Baudelaire
Et qu'il est beau de lire
Ces souffrances amères
Dont il fut le martyre.
De ce mal qui me hante et me métamorphose,
Il a su capturer l'intangible rayon,
L'écrire sans vergogne et lui donner des noms;
L’enivrante faconde sert le récit morose.
Ô béni sois-tu toi qu'on appelait maudit;
Toi dont la plume agile a peint mon existence
Sur une toile blanche souillée par tes souffrances.
Toi qui fit de ma peine sujet de poésie.
Dans ce livre abîmé car trop de fois relu,
Je perçois des abîmes dont on ne revient pas
J'aimerais y plonger, m'y engouffrer, hélas!
Ma vertu m'en empêche de peur d'être éperdu.
Les fleurs du mal éclosent en mon sein dérisoire
Lorsque je me délecte de ces phrasés subtils
Puis, fatales, se fanent me laissant seul, débile.
De retour à la prose, je revis mes déboires.
Enki Bilal souvent a chanté ses louanges,
Avec lui maints auteurs le citent en référence,
Car comment ignorer sa profonde élégance,
Qui inspire les hommes et fait déchoir les anges.
Je me retrouve tant dans ce furieux portrait
Qui est fait de la vie, dévoilant son visage
Montrant l'amour cruel et le désir sauvage
Contraste étourdissant, sulfure ou volupté?
Mais mon alexandrin est terne et ne sied pas
Mon ambition fougueuse d’honorer ce travail
Qui flatte mon esprit, fait vibrer mes entrailles
Sempiternelle augure d'un éternel effroi.
S'échapper dans les nimbes de son talent d'artiste,
Fuyant la pesanteur d'une salace incarnation
Qu'on ne peut oublier que par l'obstination
De croire que l'art peut rendre la vie beaucoup moins triste.
Dès lors sont mélangés le mal et le délice,
D'un rêve parisien l'on subit les caprices
Le spleen nous envahit et nos humeurs tarissent,
Et l'on savoure alors cet extasiant supplice.
L'élévation nous pousse à dépasser nos mœurs,
L'hymne à la beauté l'orne de son cynisme,
Spiritualité doublée de nihilisme,
Paradoxale idée qu'on nous chante en cœur.
Chaque poème touche par génie la justesse;
Lyrisme si moderne de diverses façons,
Dont je me meus confiant d'en tirer ma leçon:
À ces vers je m'adonne et d'ailleurs le confesse.